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mathias sandorf.

commençât à se produire ; puis, la vitesse s’accroissant par la masse mise en mouvement, le petit navire s’en irait de lui-même dans son élément naturel.

Déjà, une demi-douzaine de charpentiers, armés de masses en fer, frappaient sur les coins introduits à l’avant sous la quille du trabacolo, afin de le soulever quelque peu, de manière à déterminer l’ébranlement qui l’entraînerait vers la mer.

Chacun suivait cette opération avec le plus vif intérêt, au milieu du silence général.

En ce moment, au détour de la pointe, qui couvre vers le sud le port de Gravosa, apparut un yacht de plaisance. C’était une goélette, jaugeant environ trois cent cinquante tonneaux. Elle essayait d’enlever à la bordée cette pointe du chantier de construction, afin d’ouvrir l’entrée du port. Comme la brise venait du nord-ouest, elle serrait le vent, les amures à bâbord, de manière à n’avoir plus qu’à laisser arriver pour atteindre son poste de mouillage. Avant dix minutes, elle serait rendue et grossissait rapidement aux yeux, comme si on l’eût regardée avec une lunette, dont le tube se fût allongé par un mouvement continu.

Or, précisément, pour entrer dans le port, il fallait que cette goélette passât devant le chantier où se préparait le lancement du trabacolo. Aussi,