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pescade et matifou.

combattre « le combat de la vie ». Tous deux étaient de la Provence.

D’où leur venaient ces noms bizarres, qui avaient peut-être quelque renommée là-bas, dans leur pays lointain ? Était-ce de ces deux points géographiques, entre lesquels s’ouvre la baie d’Alger, — le cap Matifou et la pointe Pescade ? Oui, et, en réalité, ces noms leur allaient parfaitement, comme celui d’Atlas à quelque géant de luttes foraines.

Le cap Matifou, c’est un mamelon énorme, puissant, inébranlable, qui se dresse à l’extrémité nord-est de la vaste rade d’Alger, comme pour défier les éléments déchaînés et mériter le vers célèbre :

Sa masse indestructible a fatigué le temps !

Or, tel était l’athlète Matifou, un Alcide, un Porthos, un rival heureux des Ompdrailles, des Nicolas Creste et autres célèbres lutteurs, qui illustrent les arènes du Midi.

Cet athlète — « il faut le voir pour le croire », dirait-on de lui, — avait près de six pieds de haut, la tête volumineuse, les épaules à proportion, la poitrine comme un soufflet de forge, les jambes comme des baliveaux de douze ans, les bras comme des bielles de machine, les mains comme des cisailles. C’était la vigueur humaine dans toute sa splendeur,