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le torrent de la foïba.

Mais, en même temps, si les parois s’écartaient, la voûte tendait à s’abaisser. En levant la main, le comte Sandorf put effleurer les schistes irréguliers, qui falonnaient au-dessus de sa tête. Parfois aussi, il entendait comme un bruit de frottement : c’était quelque racine de l’arbre, dressée verticalement, dont l’extrémité frôlait la voûte. De là, de violentes secousses imprimées au tronc, qui basculait et dont la direction se modifiait. Pris de travers, roulant sur lui-même, il tournoyait alors, et les fugitifs pouvaient craindre d’en être arrachés.

Ce danger évité, — après s’être reproduit plusieurs fois, — il en restait un autre, dont le comte Sandorf calculait froidement toutes les conséquences : c’était celui qui pouvait résulter de l’abaissement continu de la voûte du Buco. Déjà il n’avait pu y échapper qu’en se renversant brusquement en arrière, dès que sa main rencontrait une saillie de roc. Lui faudrait-il donc se replonger dans le courant ? Lui, il pourrait le tenter encore, mais son compagnon, comment parviendrait-il à le soutenir entre deux eaux ? Et si le canal souterrain s’abaissait ainsi sur un long parcours, serait-il possible d’en sortir vivant ? Non, et c’eût été la mort définitive, après tant de morts évitées jusque-là !