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en vue de la nouvelle-angleterre

« À quoi songez-vous, Strock ?… me demanda mon chef.

— À ceci, monsieur Ward, c’est que, en ce qui concerne ledit moteur dudit bateau, il serait aussi fort et aussi inconnu que celui de cette fantastique automobile dont on n’a plus entendu parler depuis le match de l’American-Club…

— C’est la réflexion que vous avez faite, Strock ?…

— Oui, monsieur Ward. »

Et alors cette conclusion s’imposait : c’est que, si le mystérieux chauffeur avait disparu, s’il avait péri avec son appareil dans les eaux du lac Michigan, il faudrait obtenir, coûte que coûte, le secret du non moins mystérieux navigateur, et souhaiter qu’il ne s’engloutît pas dans les abîmes de la mer avant de l’avoir livré. Est-ce que ce n’est pas l’intérêt d’un inventeur de mettre en lumière son invention ?… Est-ce que l’Amérique ou tout autre État ne lui en donnerait pas le prix qu’il exigerait ?…

Par malheur, si l’inventeur de l’appareil terrestre avait toujours conservé l’incognito, n’était-il pas à craindre que l’inventeur de l’appareil marin ne voulût garder le sien ?… En admettant même que le premier existât encore, on n’en avait plus entendu parler. Or, pour ce qui concernait le second, n’en serait-il pas de même, et, après avoir évolué en vue de Boston, de Portsmouth, de Portland, ne disparaîtrait-il pas à son tour, sans laisser de ses nouvelles ?…

Puis, ce qui pouvait donner quelque valeur à cette hypothèse, c’est que, depuis l’arrivée du rapport à Washington, c’est-à-dire depuis vingt-quatre heures, la présence de l’extraordinaire engin n’avait plus été signalée au large du littoral par les sémaphores de la côte !…

J’ajouterai qu’il ne s’était pas montré en d’autres parages. Il est vrai, certifier sa disparition définitive, c’eût été au moins très hasardeux !

Il convient, d’ailleurs, de noter ce point important : c’est que