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à morganton

lement quelques-unes. Ses fermiers recevaient fréquemment sa visite, et, en somme, tout le temps qu’il ne résidait pas dans son home de la bourgade, il le passait en excursions et en chasses, irrésistiblement entraîné par ses instincts cynégétiques.

Dans l’après-midi je me fis conduire à la maison d’Élias Smith. Il s’y trouvait ce jour-là, ayant été prévenu par télégramme. Je lui remis la lettre d’introduction de M. Ward qui m’accréditait près de lui, et notre connaissance fut bientôt faite.

Le maire de Morganton m’avait reçu très rondement, sans façon, la pipe à la bouche, le verre de brandy sur la table. Un second verre fut aussitôt apporté par la servante, et je dus faire raison à mon hôte avant de commencer l’entretien.

« C’est M. Ward qui vous envoie, me dit-il d’un ton de bonne humeur, eh bien, buvons d’abord à la santé de M. Ward ! »

Il fallut choquer les verres et les vider en l’honneur du directeur général de la police…

« Et maintenant, de quoi s’agit-il ?… » me demanda Élias Smith…

Je fis alors connaître au maire de Morganton le motif et le but de ma mission dans ce district de la Caroline du Nord. Je lui rappelai les faits ou plutôt les phénomènes dont la région venait d’être le théâtre. Je lui marquai — et il en convint — à quel point il importait que les habitants de cette région fussent rassurés ou tout au moins mis sur leurs gardes. Je lui déclarai que les autorités se préoccupaient à bon droit de cet état de choses et voulaient y porter remède si cela était en leur puissance. Enfin, j’ajoutai que mon chef m’avait donné pleins pouvoirs à l’effet de mener rapidement et efficacement une enquête relative au Great-Eyry. Je ne devais reculer devant aucune difficulté, ni devant aucune dépense, étant bien entendu que le ministère prenait tous les frais de ma mission à sa charge.

Élias Smith m’avait écouté sans prononcer une parole, mais