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mètres. L’Albatros le suivit dans son mouvement ascensionnel, et, ainsi que le dirent les journaux, dont ma mémoire garde l’exact récit, il évoluait sur ses flancs, il l’enserrait de cercles dont le rayon diminuait à chaque tour. Allait-il l’anéantir d’un bond en crevant sa fragile enveloppe ?…

Le Go a head, se débarrassant d’une partie de son lest, monta de mille mètres encore… L’Albatros, imprimant à ses hélices leur maximum de rotation, le suivit jusque-là.

Soudain, une explosion se produisit. L’enveloppe du ballon venait de se déchirer sous la pression du gaz trop dilaté à cette altitude, et, à demi dégonflé, il tombait rapidement.

Et, alors, voici que l’Albatros se précipite vers lui, non pour l’achever, mais pour lui porter secours. Oui ! Robur, oubliant sa vengeance, a rejoint le Go a head et ses hommes, enlevant Uncle Prudent, Phil Evans, l’aéronaute, les firent passer sur la plate-forme de l’aéronef. Puis le ballon, presque entièrement vide, retomba, énorme loque, sur les arbres de Fairmont-Park.

Le public haletait d’émotion, de frayeur !…

Et maintenant que le président et le secrétaire du Weldon-Institut étaient redevenus les prisonniers de l’ingénieur Robur, que se passerait-il ?… Robur voulait-il les entraîner avec lui dans l’espace, et pour jamais, cette fois ?…

On fut presque aussitôt fixé à ce sujet. Après avoir stationné quelques minutes à la hauteur de cinq à six cents mètres, l’Albatros commença à redescendre, comme pour atterrir sur la clairière de Fairmont-Park. Et, pourtant, s’il venait à portée, la foule, affolée, se retiendrait-elle assez pour ne pas se jeter sur l’aéronef, et laisserait-elle s’échapper cette occasion de s’emparer de Robur-le-Conquérant ?…

L’Albatros descendait toujours, et, lorsqu’il ne fut plus qu’à cinq ou six pieds du sol, ses hélices suspensives fonctionnant toujours, il s’arrêta :