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les épaules, il vint s’asseoir à l’arrière, sans modifier la marche de l’Épouvante.

Un quart d’heure après, je reconnus que deux fumées se dessinaient dans le nord-est. Peu à peu, la forme des points s’accusa plus nettement.

C’étaient deux steamers, sortis du port de Buffalo, qui s’approchaient avec rapidité.

Soudain, j’eus la pensée que ces steamers étaient les destroyers dont m’avait parlé M. Ward, chargés depuis quelque temps de surveiller cette partie du lac, ceux-là même dont je pouvais réquisitionner le concours.

Ces destroyers, d’un type récent, comptaient parmi les steamers les plus vites construits aux États-Unis. Mus par de puissantes machines au dernier degré de la perfection, leurs essais avaient obtenu vingt-sept milles à l’heure.

Il est vrai, l’Épouvante possédait une marche très supérieure et, en tout cas, si, serrée de trop près, la retraite eût paru impossible, il lui suffirait de s’immerger et elle serait à l’abri de toute poursuite.

En réalité, il aurait fallu que ces steamers fussent plutôt des submersibles que des destroyers pour lutter avec quelque chance de succès, et je ne sais même pas si la partie eût été égale.

Ce qui, maintenant, ne me semblait pas douteux, c’est que les commandants de ces navires avaient été prévenus, peut-être par Wells qui, dès son retour à Toledo, leur aurait expédié une dépêche.

Il paraissait évident, d’ailleurs, qu’ayant aperçu l’Épouvante, ils marchaient à toute vitesse sur elle. Et, pourtant, le capitaine, sans paraître s’en préoccuper, continuait à se diriger vers le Niagara.

Qu’allaient faire les destroyers ?… Assurément, ils manœuvreraient de telle façon que l’Épouvante fût contrainte à s’engager