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LES VOYAGEURS DU XIXe SIÈCLE.

la ville, des cérémonies du culte, et à quelques observations astronomiques, qui servirent à déterminer la position de cette capitale de l'islamisme. Le 23 mars 1810, Seetzen était rentré à Djedda, puis il s'embarquait, avec l'Arabe qui lui avait servi d'instituteur à la Mecque, pour Hodéida, un des principaux ports de l'Yemen. Après avoir passé par Beith-el-Fakih, le canton montagneux où l'on cultive le café, après avoir été retenu près d'un mois à Doran par la maladie, Seetzen entra le 2 juin dans Saana, la capitale de l'Yemen, qu'il appelle la plus belle ville de l'Orient. Le 22 juillet, il descendait jusqu'à Aden, et, en novembre, il était à Moka, d'où sont datées les dernières lettres qu'on reçut de lui. Rentré dans l'Yemen, il fut, comme Niebuhr, dépouillé de ses collections et de ses bagages, sous le prétexte qu'il récoltait des animaux, afin d'en composer un philtre destiné à empoisonner les sources. Mais Seetzen ne voulut pas se laisser dépouiller sans rien dire. Il partit immédiatement pour Saana, où il comptait exposer à l'iman ses réclamations. On était au mois de décembre 1811. Quelques jours plus tard, le bruit de sa mort subite à Taes se répandait et ne tarda pas à venir aux oreilles des Européens qui fréquentaient les ports arabes. A qui faut-il faire remonter la responsabilité de cette mort? A l'iman ou à ceux qui avaient dévalisé l'explorateur? Peu nous importe aujourd'hui; mais il est permis de regretter qu'un voyageur si bien organisé, déjà au courant des habitudes et des mœurs arabes, n'ait pu pousser plus loin ses explorations, et que la plus grande partie de ses journaux et de ses observations ait été à jamais perdue. «Seetzen, dit M. Vivien de Saint-Martin, était, depuis Ludovico Barthema (1503), le premier voyageur qui eût été à la Mecque, et aucun Européen, avant lui, n'avait vu la cité sainte de Médine, consacrée par le tombeau du Prophète.» On comprend, par là, tout le prix qu'aurait eu la relation de ce voyageur désintéressé, bien informé et véridique. Au moment où une mort inopinée mettait fin à la mission que s'était tracée Seetzen, Burckhardt s'élançait sur ses traces, et, comme celui-ci l'avait fait, préludait par des courses en Syrie, à une longue et minutieuse exploration de l'Arabie. «C'est une chose peu commune dans l'histoire de la science, dit M. Vivien de Saint-Martin, de voir deux hommes d'une aussi haute valeur se succéder ou plutôt se continuer ainsi dans la même carrière. Burckhardt, en effet, allait suivre, sur beaucoup de points, la trace que Seetzen avait ouverte, et, longtemps secondé par des circonstances favorables qui lui permirent de multiplier