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LES PRÉCURSEURS DU CAPITAINE COOK.

sonne descendre à terre avant d’être fouillé, ces faits se renouvelèrent à plusieurs reprises.

Une expédition, envoyée dans l’intérieur de l’île, reconnut une large vallée qu’arrosait une belle rivière. Partout le terrain était cultivé avec un soin extrême, et des saignées avaient été pratiquées pour arroser les jardins et les plantations d’arbres fruitiers. Plus on s’enfonçait dans l’intérieur, plus les sinuosités de la rivière devenaient capricieuses ; la vallée se rétrécissait, les collines tournaient à la montagne, la route devenait de plus en plus difficile. Un pic, éloigné d’environ six milles du lieu du débarquement, fut escaladé dans l’espoir que l’on découvrirait l’île tout entière jusque dans ses moindres replis. Mais la vue était bornée par des montagnes encore plus élevées. Du côté de la mer, cependant, aucun obstacle ne venait cacher le tableau enchanteur qui se développait sous les yeux : partout des collines tapissées de bois magnifiques ; sur leur verdure, les cases des indigènes se détachaient en clair ; dans les vallées, le spectacle était encore plus riant, avec cette multitude de cabanes et de jardins entourés de haies vives. La canne à sucre, le gingembre, le tamarin, des fougères arborescentes, telles étaient, avec les cocotiers, les principales essences de ce pays fertile.

Wallis, qui voulait enrichir cette contrée de plusieurs productions de nos climats, fit planter des noyaux de pêches, de cerises et de prunes, ainsi que des pépins de citron, d’orange et de limon, et semer les graines d’une quantité de légumes. En même temps, il faisait présent à la reine d’une chatte pleine, de deux coqs, de poules, d’oies et de plusieurs autres animaux, qu’il supposait pouvoir se reproduire facilement.

Cependant, le temps pressait, et Wallis dut se résoudre au départ. Lorsqu’il annonça sa résolution à la reine, celle-ci se jeta dans un fauteuil et pleura longtemps, avec tant de sensibilité, que rien ne pouvait la calmer. Elle resta jusqu’au dernier moment sur le vaisseau, et quand il eut mis à la voile, « elle nous embrassa de la manière la plus tendre, dit Wallis, en versant beaucoup de pleurs, et nos amis les Taïtiens nous dirent adieu avec tant de regret et d’une façon si touchante, que j’eus le cœur serré et que mes yeux se remplirent de larmes. »

La façon peu courtoise dont les Anglais avaient été accueillis, les tentatives réitérées des indigènes pour s’emparer du bâtiment, n’étaient pas pour faire soupçonner une séparation si pénible ; mais, dit le proverbe, tout est bien qui finit bien.

Des renseignements que Wallis recueillit sur les mœurs et les habitudes des