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LES PRÉCURSEURS DU CAPITAINE COOK.

Davis, en 1592. Deux ans plus tard, sir Richard Hawkins vit une terre qu’on suppose être la même et à laquelle il donna le nom de Virginie, en l’honneur de sa souveraine, la reine Élisabeth. Enfin, des bâtiments de Saint-Malo visitèrent cet archipel. C’est sans doute ce qui lui a fait donner par Frézier le nom d’îles Malouines.

Après avoir nommé un certain nombre de rochers, d’îlots et de caps, le 27 janvier Byron quitta le port Egmont et fit voile pour le port Désiré, qu’il atteignit neuf jours plus tard. Il y trouva la Floride, vaisseau-transport, qui lui apportait d’Angleterre les vivres et les rechanges nécessaires à sa longue navigation. Mais ce mouillage était trop périlleux, la Floride et la Tamar étaient en trop mauvais état pour qu’il fût possible de procéder à une opération aussi longue qu’un transbordement. Byron envoya donc sur la Floride un de ses bas officiers, qui avait une parfaite connaissance du détroit de Magellan, et mit à la voile avec ses deux conserves pour le port Famine.

À plusieurs reprises, il rencontra, dans le détroit, un bâtiment français qui semblait faire la même route que lui. À son retour en Angleterre, il apprit que c’était l’Aigle, commandé par M. de Bougainville, qui venait sur la côte de Patagonie faire des coupes de bois nécessaires à la nouvelle colonie française des îles Falkland.

Pendant ses différentes escales dans le détroit, l’expédition anglaise reçut la visite de plusieurs hordes de Fuégiens.

« Je n’avais pas encore vu, dit Byron, de créatures si misérables. Ils étaient nus, à l’exception d’une peau très puante de loup de mer, jetée sur leurs épaules ; ils étaient armés d’arcs et de flèches, qu’ils me présentèrent pour quelques grains de collier et d’autres bagatelles. Les flèches, longues de deux pieds, étaient faites de roseau et armées d’une pierre verdâtre ; les arcs, dont la corde était de boyau, avaient trois pieds de longueur.

« Quelques fruits, des moules, des débris de poisson pourri, jetés par la tempête sur le rivage, constituaient toute leur nourriture. Il n’y eut guère que les cochons qui voulurent goûter de leurs mets ; c’était un gros morceau de baleine déjà en putréfaction et dont l’odeur infectait l’air au loin. L’un d’eux découpait, avec les dents, cette charogne et en présentait les morceaux à ses compagnons, qui les mangeaient avec la voracité de bêtes féroces.

« Plusieurs de ces misérables sauvages se déterminèrent à monter à bord. Voulant leur faire fête, un de mes bas officiers joua du violon, et quelques matelots dansèrent. Ils furent enchantés de ce petit spectacle. Impatients d’en marquer leur reconnaissance, l’un d’eux se hâta de descendre dans sa pirogue ; il en rap-