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LES GRANDS NAVIGATEURS DU XVIIIe SIECLE.

trade de roseaux, et, de là, le voyageur peut apercevoir la scène majestueuse qui se déroule sous ses pieds.

Les pluies et les difficultés de la route avaient rendu extrêmement pénible la route jusqu’à Quito. Cependant, Humboldt et Bonpland ne s’y arrêtèrent que le temps strictement nécessaire pour se reposer ; puis, ils regagnèrent la vallée de la Magdalena et les magnifiques forêts qui tapissent les lianes du Quindiu, dans les Andes centrales.

Le passage de cette montagne est considéré comme l’un des plus difficiles de la chaîne. Dans le moment de la saison le plus favorable, il ne faut pas moins d’une douzaine de jours pour traverser ses forêts, où l’on ne rencontre pas un homme, où l’on ne peut trouver de quoi se nourrir. Le point culminant s’élève de douze mille pieds au-dessus du niveau de la mer, et le sentier qu’il faut suivre n’a souvent qu’un pied de largeur. On passe généralement cet endroit assis et lié sur une chaise, que les Indiens Cargueros portent sur leur dos la façon d’un crochet.

« Nous préférâmes aller à pied, dit Humboldt dans une lettre à son frère, et, le temps étant très beau, nous ne passâmes que dix-sept jours dans ces solitudes où l’on ne trouve aucune trace qu’elles aient jamais été habitées. On y dort dans des cabanes formées de feuilles d’héliconia, que l’on porte tout exprès avec soi. À la descente occidentale des Andes, il y a des marais dans lesquels on enfonce jusqu’aux genoux. Le temps avait changé, il pleuvait à verse les derniers jours ; nos bottes nous pourrirent aux jambes, et nous arrivâmes les pieds nus et couverts de meurtrissures à Carthago, mais enrichis d’une belle collection de nouvelles plantes.

« De Carthago, nous allâmes à Popayan par Buga, en traversant la belle vallée de la rivière Cauca et ayant toujours à nos côtés la montagne de Choca et les mines de platine qui s’y trouvent.

« Nous restâmes le mois de novembre de l’année 1801 à Popayan, et nous y allâmes visiter les montagnes basaltiques de Julusuito, les bouches du volcan de Puracé, qui, avec un bruit effrayant, dégagent des vapeurs d’eau hydrosulfureuse et les granites porphyritiques de Pisché....

« La plus grande difficulté nous resta à vaincre pour venir de Popayan à Quito. Il fallut passer les Paramos de Pasto, et cela dans la saison des pluies, qui avait commencé en attendant. On nomme « paramo », dans les Andes, tout endroit où, à la hauteur de 1 700 à 2 000 toises, la végétation cesse et où l’on sent un froid qui pénètre les os. Pour éviter les chaleurs de la vallée de Patia, où l’on prend en une seule nuit des fièvres qui durent trois ou quatre mois et