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LES GRANDS NAVIGATEURS DU XVIIIe SIÈCLE.

et de lances. Ils étaient blancs et ne différaient des Européens qu’en ce que quelques-uns avaient la peau brûlée par les ardeurs du soleil. Leur corps n’était pas orné de peintures. Une bande d’étoffe, artistement lissée et garnie de franges, les enveloppait de la ceinture aux talons. Un chapeau de même étoffe les abritait, et des colliers de fleurs odorantes entouraient leur cou.

« Il faut avouer, dit Behrens, que c’est la nation la plus humanisée et la plus honnête que nous ayons vue dans les îles de la mer du Sud ; charmés de notre arrivée, ils nous reçurent comme des dieux, et, lorsque nous nous disposâmes à partir, ils témoignèrent les regrets les plus vifs. »

Selon toute vraisemblance, ce sont les habitants des îles des Navigateurs.

Après avoir reconnu des îles que Roggewein crut être celles des Cocos et des Traîtres, visitées déjà par Schouten et Lemaire, et que Fleurieu, les considérant comme une découverte hollandaise, appelle îles Roggewein ; après avoir aperçu les îles Tienhoven et Groningue, que Pingré croit être la Santa-Cruz de Mendana, l’expédition atteignit enfin les côtes de la Nouvelle-Irlande, où elle se signala par de nouveaux massacres. De là, elle gagna les rivages de la Nouvelle-Guinée, et, après avoir traversé les Moluques, jeta l’ancre à Batavia.

Là, ses compatriotes, moins humains que quelques-unes des peuplades que Roggewein avait visitées, confisquèrent les deux bâtiments, emprisonnèrent matelots et officiers, sans distinction de grade, et les envoyèrent en Europe pour qu’on leur fît leur procès. Crime impardonnable, ils avaient mis le pied sur des terres appartenant à la Compagnie des Indes Orientales, alors qu’eux-mêmes étaient sous les ordres de la Compagnie des Indes Occidentales ! Il s’ensuivit un procès, et la Compagnie d’Orient fut condamnée à restituer tout ce qu’elle avait saisi et à payer des dommages considérables.

Depuis son retour au Texel, le 11 juillet 1723, nous perdons complètement de vue Roggewein, et nous n’avons aucun détail sur les dernières années de son existence. Il faut savoir le plus grand gré à Fleurieu d’avoir débrouillé le chaos de cette longue navigation, et d’avoir jeté un peu de lumière sur une expédition qui mériterait d’être mieux connue.

Le 17 juin 1764, des instructions signées du lord de l’Amirauté étaient remises au commodore Byron. Elles commençaient ainsi :

« Comme rien n’est plus propre à contribuer à la gloire de cette nation en qualité de puissance maritime, à la dignité de la couronne de la Grande-Bretagne et aux progrès de son commerce et de sa navigation, que de faire des découvertes de régions nouvelles ; et comme il y a lieu de croire qu’on peut trouver dans la mer Atlantique, entre le cap de Bonne-Espérance et le détroit de Magellan, des