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LES GRANDS NAVIGATEURS DU XVIIIe SIÈCLE.

qui trafiquaient sur le fleuve, croyant que le commerce était l’unique but du major, et craignant qu’il ne leur enlevât leur bénéfice par sa concurrence, avaient résolu sa mort.

« Pour se soustraire au danger qui le menaçait, il jugea à propos de quitter la route ordinaire. Il traversa, avec ses ânes, le fleuve à la nage, et se trouva sur la rive méridionale, dans le royaume de Cantor. »

Houghton passa ensuite une seconde fois le fleuve, et pénétra dans le royaume de Woolli.

Là, il s’empressa d’envoyer au roi un messager, pour lui porter des présents et lui demander sa protection. Celui-ci reçut le voyageur avec bienveillance et hospitalité dans sa capitale. Medina, d’après le voyageur, est une ville importante, entourée d’une campagne fertile où paissent de nombreux troupeaux.

Le major Houghton pouvait attendre une bonne issue de son voyage ; du moins tout le faisait présager, lorsqu’un accident vint porter un premier coup à ses espérances. Le feu prit à l’une des cases voisines de celle où il logeait, et bientôt la ville tout entière fut en flammes. Son interprète, qui avait déjà fait plusieurs tentatives pour le voler, saisit cette occasion et s’enfuit avec un cheval et trois ânes.

Mais le roi de Woolli continuait à protéger le voyageur et le comblait de cadeaux, précieux non par leur valeur, mais par l’affection dont ils étaient le gage. Ce roi protecteur des Européens avait nom Djata ; bon, humain, intelligent, il aurait voulu que les Anglais construisissent une factorerie dans ses États.

« Le capitaine Littleton, écrivait Houghton à sa femme, a fait, en séjournant ici quatre ans, une fortune considérable ; il possède actuellement plusieurs vaisseaux qui font le commerce sur le fleuve. On se procure ici, en tout temps, et pour des babioles de peu de valeur, de l’or, de l’ivoire, de la cire, des esclaves, et il est facile de gagner huit capitaux pour un. La volaille, les brebis, les œufs, le beurre, le lait, le miel, le poisson s’y trouvent en une abondance extrême, et, avec dix livres sterling, on y entretiendrait, dans l’aisance, une famille nombreuse. Le sol est sec, l’air très sain, et le roi de Woolli m’a dit qu’il n’était jamais mort un seul blanc à Fatatenda. »

Houghton parvint ensuite sur la Falémé, jusqu’à Cacullo, le Cacoulou de la carte de d’Anville, et se procura, dans le Bambouk, quelques renseignements sur le Djoliba, fleuve qui coule dans l’intérieur du Soudan. Sa direction est d’abord du sud au nord jusqu’à Djenné, puis de l’ouest à l’est jusqu’à Tombouctou, informations qui devaient être bientôt confirmées par Mungo-Park.