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LES GRANDS NAVIGATEURS DU XVIIIe SIÈCLE.

d’Égypte par Monge et Berthollet. Bonaparte lui fit excellent accueil et mit à sa disposition toutes les ressources du pays.

Pour Hornemann, la plus sûre manière de voyager était de se déguiser en marchand mahométan. Il se hâta donc d’apprendre certaines prières, d’adopter certaines habitudes suffisantes à ses yeux pour tromper des gens non prévenus. D’ailleurs, il partait avec un de ses compatriotes, Joseph Frendenburgh, qui, depuis douze ans, avait embrassé la religion musulmane, avait fait trois voyages à la Mecque et parlait avec facilité les divers dialectes turcs et arabes les plus usités. Il devait servir d’interprète à Hornemann.

Le 5 septembre 1798, le voyageur quitta le Caire avec une caravane de marchands et commença par visiter la fameuse oasis de Jupiter Ammon ou de Siouah, située dans le désert, à l’est de l’Égypte. C’est un petit État indépendant, qui reconnaît le sultan, mais sans lui payer tribut. Autour de la ville de Siouah, se trouvent plusieurs villages à un ou deux milles de distance. La ville est bâtie sur un rocher dans lequel les habitants se sont creusé leurs demeures. Les rues sont si étroites, si embrouillées, qu’un étranger ne peut s’y reconnaître.

L’étendue de cette oasis est considérable. Son district le plus fertile est une vallée bien arrosée, d’environ cinquante milles de circuit, qui produit du blé et des végétaux comestibles. Son produit le plus rémunérateur consiste en dattes d’un excellent goût, dont la renommée est proverbiale chez les Arabes du Sahara.

Tout d’abord, Hornemann avait aperçu des ruines qu’il se promettait de visiter, car les renseignements qu’il avait recueillis des habitants ne lui avaient pas appris grand’chose. Mais, lorsqu’il pénétra dans l’enceinte de ces monuments, il y fut suivi, chaque fois, par un certain nombre d’habitants, qui l’empêchèrent d’examiner en détail. Un des Arabes lui dit même : « Il faut que vous soyez encore chrétien dans le cœur, pour que vous veniez si souvent visiter les ouvrages des infidèles. »

On comprendra, d’après cela, qu’Hornemann dut renoncer à toute recherche ultérieure. Autant qu’il put en juger d’après cet examen superficiel, c’est bien l’oasis d’Ammon, et les ruines paraissent être d’origine égyptienne.

Une preuve de la densité de l’ancienne population de cette oasis, est le nombre prodigieux des catacombes qu’on rencontre à chaque pas et surtout sous la colline qui porte la ville. Ce fut en vain que, dans ces nécropoles, le voyageur chercha à se procurer une tête entière ; parmi les occiputs qu’il recueillit, il ne put trouver la preuve qu’ils eussent été remplis de résine. Quant aux vêtements, il en trouva de nombreux fragments, mais dans un