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LES NAVIGATEURS FRANÇAIS.

sans être aujourd’hui devenus des crus renommés, fournissent un vin agréable à boire et très chargé d’alcool.

À trente milles de Sydney se déroule la chaîne des Montagnes-Bleues, qui fut longtemps la limite des connaissances des Européens. Le lieutenant Dawes, le capitaine Teuch Paterson, qui remonta la rivière Hawkesburg, ce Nil de la Nouvelle-Hollande, Hacking, Bass et Barraillier, avaient jusqu’alors tenté sans succès de franchir ces montagnes escarpées.

Déjà, à cette époque, l’écartement des arbres dans les forêts voisines de la ville, l’abondance et l’excellente qualité des herbages avaient fait considérer la Nouvelle-Galles du Sud comme un excellent pâturage. Des bêtes à cornes et des moutons avaient été importés en quantité.

« Ils s’y sont tellement multipliés, que, dans les seules bergeries de l’État, on comptait, à une époque peu éloignée de celle de notre séjour à Port-Jackson, 1800 bêtes à cornes, dont 514 taureaux, 121 bœufs et 1165 vaches. La progression de l’accroissement de ces animaux est si rapide, que, dans l’espace de onze mois seulement, le nombre des bœufs et des vaches a été porté de 1856 à 2450 ; ce qui suppose pour l’année entière une augmentation de 650 individus ou du tiers de la totalité.

« Qu’on calcule maintenant la marche d’un tel accroissement d’animaux pour une période de trente ans, et l’on restera persuadé qu’en le réduisant même à moitié, la Nouvelle-Hollande se trouverait alors couverte sur ce point d’innombrables troupeaux de bétail.

« Les moutons ont fourni des résultats encore plus avantageux ; et telle est la rapidité de leur multiplication sur ces rivages lointains, que le capitaine Mac-Arthur, un des plus riches propriétaires de la Nouvelle-Galles du Sud, ne craint pas d’assurer, dans un mémoire publié à cet effet, qu’avant vingt ans, la Nouvelle-Hollande pourra fournir seule à l’Angleterre toute la laine qu’on y importe aujourd’hui des pays voisins, et dont le prix d’achat s’élève chaque année, dit-il, à 1,800,000 livres sterling (environ 43 millions de francs). »

On sait aujourd’hui combien ces estimations, toutes merveilleuses qu’elles paraissaient alors, étaient peu exagérées. Mais, certes, il était intéressant de prendre cette industrie pastorale, aujourd’hui si florissante, à ses premiers débuts et de recueillir l’impression d’étonnement que les résultats déjà acquis avaient produite sur les navigateurs français.

Les équipages avaient en partie recouvré la santé ; mais le nombre des matelots capables de continuer la campagne était tellement restreint, qu’il fallut se résigner à renvoyer en France le Naturaliste, après en avoir tiré les hommes les