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LES NAVIGATEURS FRANÇAIS.

ciers, MM. Guyet, enseigne, et Le Gobien, garde de marine, les deux équipages appareillèrent pour la côte de Chine.

Le 21, La Pérouse eut connaissance de Formose et s’engagea aussitôt dans le canal qui sépare cette île de la Chine. Il y découvrit un banc fort dangereux, inconnu des navigateurs, et en releva soigneusement les sondages et les approches. Bientôt après, il passa devant la baie de l’ancien fort hollandais de Zélande, où est située la ville de Taywan, capitale de cette île.

La mousson n’étant pas favorable pour remonter le canal de Formose. La Pérouse se détermina à passer dans l’est de cette île. Il rectifia la position des îles Pescadores, amas de rochers qui affectent toute sorte de figures, reconnut la petite île de Botol-Tabaco-Xima, où jamais aucun voyageur n’avait abordé, prolongea l’île Kimu, qui fait partie du royaume de Likeu, dont les habitants ne sont ni Chinois ni Japonais, mais paraissent tenir des deux peuples, et vit les îles Hoa-pinsu et Tiaoyu-su, qui font partie de l’archipel de Likeu, connu seulement par les lettres d’un jésuite, le père Gaubil.

Les frégates entrèrent alors dans la mer Orientale et se dirigèrent vers l’entrée du canal qui sépare la Chine du Japon. La Pérouse y rencontra des brumes aussi épaisses que sur les côtes du Labrador et des courants variables et violents. Le premier point intéressant à fixer, avant d’entrer dans le golfe du Japon, était l’île Quelpaert, connue des Européens par le naufrage du SparrowHawk, en 1635. La Pérouse en détermina la pointe sud et la releva avec le plus grand soin sur un prolongement de douze lieues.

« Il n’est guère possible, dit-il, de trouver une île qui offre un plus bel aspect : un pic d’environ mille toises, qu’on peut apercevoir de dix-huit à vingt lieues, s’élève au milieu de l’île, dont il est sans doute le réservoir ; le terrain descend en pente très douce jusqu’à la mer, d’où les habitations paraissent en amphithéâtre. Le sol nous a semblé cultivé jusqu’à une très grande hauteur. Nous apercevions, à l’aide de nos lunettes, les divisions des champs ; ils sont très morcelés, ce qui prouve une grande population. Les nuances très variées des différentes cultures rendaient la vue de cette île encore plus agréable. »

Les explorateurs purent heureusement faire les meilleures observations de longitude et de latitude, — ce qui était d’autant plus important que jamais vaisseau européen n’avait parcouru ces mers, qui n’étaient tracées sur nos mappemondes que d’après les cartes chinoises et japonaises publiées par les jésuites.

Le 25 mai, les frégates embouquèrent le détroit de Corée, qui fut minutieusement relevé et dans lequel des sondages furent pratiqués toutes les demi-heures.