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LES GRANDS NAVIGATEURS DU XVIIIe SIÈCLE.

parler la langue de Taïti. Aussi, les relations furent-elles bientôt amicales, et, le lendemain, nombre d’insulaires consentirent à monter sur les vaisseaux. Leur étonnement, leur admiration à la vue de tant d’objets inconnus, s’exprimaient par leurs regards, leurs gestes et leurs exclamations continuelles ! Cependant, ils connaissaient le fer, qu’ils nommaient « hamaïte ».

Mais tant de curiosités, d’objets précieux, ne tardèrent pas à exciter leur convoitise, et ils s’efforcèrent de se les approprier par tous les moyens licites ou non.

Leur adresse, leur goût pour le vol étaient aussi vifs que chez tous les peuples de la mer du Sud ; il fallut prendre mille précautions, — encore furent-elles vaines le plus souvent, — pour s’opposer à leurs larcins. Lorsque les Anglais, sous la conduite du lieutenant Williamson, s’approchèrent du rivage afin de sonder et de chercher un mouillage, ils durent repousser les tentatives des naturels par la force. La mort d’un de ces sauvages servit à réprimer leur turbulence et à leur donner une haute idée de la puissance des étrangers.

Cependant, aussitôt que la Résolution et la Discovery eurent laissé tomber l’ancre dans la baie de Ouai-Mea, Cook se fit porter à terre. Il n’eut pas plus tôt touché le rivage, que les naturels, assemblés en troupe nombreuse sur la grève, se prosternèrent à ses pieds, et l’accueillirent avec les témoignages du respect le plus profond. Cette réception extraordinaire promettait une relâche agréable, car les provisions semblaient abondantes, et les fruits, les cochons, la volaille, commencèrent à affluer de toutes parts. En même temps, une partie des indigènes aidait les matelots anglais à remplir d’eau les futailles et à les embarquer dans les chaloupes.

Ces dispositions conciliantes déterminèrent Anderson et le dessinateur Webber à s’enfoncer dans l’intérieur du pays. Ils ne tardèrent pas à se trouver en présence d’un moraï, de tout point semblable aux moraïs taïtiens. Cette découverte confirma les Anglais dans les idées qu’avait fait naître en eux la ressemblance de la langue de Hawaï avec celle de Taïti. Une gravure de la relation de Cook représente l’intérieur de ce moraï. On y voit deux figures debout, dont le haut de la tête disparaît en partie sous un haut bonnet cylindrique, semblable à ceux qui coiffent les statues de l’île de Pâques. Il y a là, à tout le moins, un rapprochement singulier, qui donne à réfléchir.

Cook resta deux jours encore à ce mouillage, n’ayant qu’à se louer de son commerce avec les indigènes ; puis, il explora l’île voisine de Oneeheow. Malgré tout le désir qu’avait le commandant de visiter en détail cet archipel, si intéressant, il appareilla, et aperçut de loin l’île Ouahou et le récif de Tahoora,