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PREMIER VOYAGE DU CAPITAINE COOK.

Le 26 août 1768, l’Endeavour quitta Plymouth et relâcha, le 13 septembre, à Funchal, dans l’île de Madère, pour y prendre des vivres frais et faire quelques recherches. L’accueil qu’y reçut l’expédition fut des plus empressés. Pendant une visite que fit l’état-major de l’Endeavour à un couvent de religieuses Clarisses, ces pauvres et ignorantes recluses les prièrent sérieusement de leur dire quand il tonnerait et leur demandèrent de leur trouver dans l’enceinte du couvent une source de bonne eau, dont elles avaient besoin. Si instruits qu’ils fussent, Banks, Solander et Cook furent dans l’impossibilité de répondre à ces naïves demandes.

De Madère à Rio-de-Janeiro, où l’expédition arriva le 13 novembre, aucun incident ne marqua le voyage ; mais l’accueil que Cook reçut des Portugais ne fut pas celui qu’il attendait. Tout le temps de la relâche se passa en altercations avec le vice-roi, homme fort peu instruit et tout à fait hors d’état de comprendre l’importance scientifique de l’expédition. Il ne put cependant se refuser à fournir aux Anglais les vivres frais dont ils manquaient absolument. Toutefois, le 5 décembre, au moment Cook passait devant le fort Santa-Cruz pour sortir de la baie, on lui tira deux coups de canon à boulet, ce qui lui fit immédiatement jeter l’ancre et demander raison de cette insulte. Le vice-roi répondit que le commandant du fort avait ordre de ne laisser sortir aucun bâtiment sans être prévenu, et que, bien que le vice-roi eut reçu de Cook l’annonce de son départ, c’était par pure négligence qu’on n’avait pas averti le commandant du fort. Était-ce un parti pris extrêmement désobligeant de la part du vice-roi ? Était-ce simplement incurie ? Si ce fonctionnaire était aussi négligent pour tous les détails de son administration, la colonie portugaise devait être bien gouvernée !

Ce fut le 14 janvier 1769, que Cook pénétra dans le détroit de Lemaire.

« La marée était alors si forte, dit Kippis dans sa Vie du capitaine Cook, que l’eau s’élevait jusqu’au-dessus du cap San-Diego, et le vaisseau, poussé avec violence, eut longtemps son beaupré sous les îlots. Le lendemain, on jeta l’ancre dans un petit havre, qu’on reconnut pour le port Maurice, et, bientôt après, on alla mouiller dans la baie de Bon-Succès. Pendant que l’Endeavour était mouillé en cet endroit, il arriva une singulière et fâcheuse aventure à MM. Banks et Solander, au docteur Green, à M. Monkhouse, chirurgien du vaisseau, et aux personnes de leur suite. Ils s’étaient acheminés vers une montagne pour y chercher des plantes, ils la gravissaient, lorsqu’ils furent surpris par un froid si vif et si imprévu, qu’ils furent tous en danger de périr. Le docteur Solander éprouva un engourdissement général. Deux domestiques nègres moururent sur la place ; enfin, ce ne fut qu’au bout de deux jours que ces messieurs purent regagner le