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les tribulations d’un chinois en chine

— Craig-Fry doivent être là, puisque vous êtes ici ! »

Et William J. Bidulph de crier :

« Craig-Fry ? »

Craig et Fry étaient, en effet, derrière la porte du cabinet particulier. Ils avaient « filé » le client de la Centenaire jusqu’à son entrée dans les bureaux, et ils l’attendaient à la sortie.

« Craig-Fry, dit alors l’agent principal, pendant toute la durée de sa police d’assurance, vous n’aurez plus à défendre notre précieux client contre lui-même, mais contre un de ses propres amis, le philosophe Wang, qui s’est engagé à l’assassiner ! »

Et les deux inséparables furent mis au courant de la situation. Ils la comprirent, ils l’acceptèrent. Le riche Kin-Fo leur appartenait. Il n’aurait pas de serviteurs plus fidèles.

Maintenant, quel parti prendre ?

Il y en avait deux, ainsi que le fit observer l’agent principal ; ou se garder très soigneusement dans la maison de Shang-Haï, de telle façon que Wang n’y pût rentrer sans être signalé à Fry-Craig, ou faire toute diligence pour savoir où se trouvait ledit Wang, et lui reprendre la lettre, qui devait être tenue pour nulle et de nul effet.

« Le premier parti ne vaut rien, répondit Kin-Fo. Wang saurait bien arriver jusqu’à moi sans se laisser voir, puisque ma maison est la sienne. Il faut donc le retrouver à tout prix.

— Vous avez raison, monsieur, répondit William J. Bidulph. Le plus sûr est de retrouver ledit Wang, et nous le retrouverons !

— Mort ou… dit Craig.

— Vif ! répondit Fry.

— Non ! vivant ! s’écria Kin-Fo. Je n’entends pas que Wang soit un instant en danger par ma faute !

— Craig et Fry, ajouta William J. Bidulph, vous répondez de notre client pendant soixante-dix sept jours encore. Jusqu’au 30 juin prochain, monsieur vaut pour nous deux cent mille dollars. »

Là-dessus, le client et l’agent principal de la Centenaire prirent congé l’un de l’autre. Dix minutes après, Kin-Fo, escorté de ses deux gardes du corps, qui ne devaient plus le quitter, était rentré dans le yamen.

Lorsque Soun vit Craig et Fry officiellement installés dans la maison, il ne laissa pas d’en éprouver quelque regret. Plus de demandes, plus de réponses,