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— Mon successeur s’appelle Dick, reprit mélancoliquement celui-ci après un court silence, et n’a pas d’autre nom. C’est un jeune homme. À peine s’il a vingt-deux ans — mais c’est moi qui l’ai formé, et j’en réponds. C’est entre ses mains, entre ses mains seules, que je résignerai le pouvoir… Telles sont mes conditions.

— Je les accepte, dit vivement l’officier chilien trop heureux d’avoir triomphé sur la question principale.

— Fort bien, approuva le Kaw-djer. Je vais donc rédiger nos conventions par écrit.

Il se mit au travail, puis le traité fut signé en triple expédition par les parties contractantes.

— Un de ces exemplaires est pour votre Gouvernement, expliqua le Kaw-djer, un deuxième pour mon successeur. Quant au troisième, je le garde, et, si les engagements qu’il constate n’étaient pas tenus, je saurais, soyez-en certain, en assurer le respect… Mais tout n’est pas fini entre nous, ajouta-t-il en présentant un autre document à son interlocuteur. Il reste à nous occuper de ma situation personnelle. Veuillez jeter les yeux sur ce deuxième traité qui la règle conformément à ma volonté.

L’officier obéit. À mesure qu’il lisait, son visage exprimait un étonnement grandissant.

— Quoi ! s’écria-t-il quand sa lecture fut achevée, c’est sérieusement que vous proposez cela !

— Si sérieusement, répondit le Kaw-djer, que j’en fais la condition sine qua non de mon consentement au surplus de notre accord. Êtes-vous disposé à l’accepter ?

— À l’instant, affirma l’officier.

Les signatures furent de nouveau échangées.

— Nous n’avons plus rien à nous dire, conclut alors le Kaw-djer. Faites rembarquer vos hommes, qui, sous aucun prétexte, ne doivent plus remettre le pied sur l’île Hoste. Demain, le nouveau régime pourra être inauguré. Je ferai le nécessaire pour qu’il ne s’élève aucune difficulté. Jusque-là, par exemple, j’exige le secret le plus absolu. »

Dès qu’il fut seul, le Kaw-djer envoya chercher Karroly. Pendant qu’on exécutait cet ordre, il écrivit quelques mots qu’il plaça sous enveloppe, en y joignant un exemplaire du traité conclu avec le gouvernement chilien. Ce travail, qui n’exigea que