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VIII

un traître.

Harry Rhodes et Hartlepool, auxquels, en l’absence du Kaw-djer, revenait naturellement l’autorité, n’avaient pas perdu leur temps, pendant que celui-ci retardait de son mieux la marche des Patagons. Les quatre jours de répit qu’ils devaient à la tactique savante de leur chef leur avaient suffi pour mettre la ville en état de défense.

Deux larges et profonds fossés, en arrière desquels les terres rejetées formaient un épaulement à l’épreuve de la balle, rendaient un coup de main impossible. L’un de ces fossés, celui du Sud, long de deux mille pas environ, partait de la rivière, puis, se recourbant en demi-cercle, embrassait la ville et allait jusqu’au marécage, qui constituait à lui seul un obstacle infranchissable. L’autre, celui du Nord, long de cinq cents pas à peine, naissait pareillement à la rivière pour aller mourir au marécage, en traversant la route réunissant Libéria au Bourg-Neuf.

La ville était ainsi défendue sur toutes les faces. Au Nord et au Nord-Est, par le marais, où un cheval se fût enlisé jusqu’au ventre ; au Nord-Ouest, et du Sud-Ouest à l’Est par les remparts improvisés ; à l’Ouest, par le cours d’eau qui opposait sa barrière liquide aux assiégeants.

Le Bourg-Neuf avait été évacué. Les habitants s’étaient réfugiés à Libéria avec tout ce qu’ils possédaient, laissant leurs maisons condamnées à une destruction certaine.

Dès le premier soir, avant même que les travaux fussent achevés et alors que le péril n’avait rien d’imminent, on commença à monter autour de la ville une garde vigilante. Une cinquantaine d’hommes étaient constamment affectés à ce service.