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Les jours suivants, en effet, la cicatrisation gagna de proche en proche avec cette rapidité, on peut dire cette fougue qui est l’apanage des tissus jeunes. Deux mois ne s’étaient pas écoulés que Sand fut autorisé à quitter le lit.

Quitter le lit ?… L’expression est impropre, à vrai dire. Sand ne pouvait plus, ne pourrait plus jamais quitter le lit, ni se mouvoir d’aucune manière sans un secours étranger. Ses jambes mortes ne supporteraient jamais plus son corps d’infirme condamné désormais à l’immobilité.

Le jeune garçon ne semblait pas, d’ailleurs, s’en affecter outre mesure. Lorsqu’il eut repris conscience des choses, sa première parole ne fut pas pour gémir sur lui-même, mais pour s’informer du sort de Dick, au salut duquel il s’était si héroïquement dévoué. Un pâle sourire entrouvrit ses lèvres quand on lui donna l’assurance que Dick était sain et sauf, mais bientôt cette assurance ne lui suffit plus, et, à mesure que les forces lui revenaient, il commença à réclamer son ami avec une insistance grandissante.

Longtemps, il fut impossible de le satisfaire. Pendant plus d’un mois, Dick ne sortit pas du délire. Son front fumait littéralement, malgré la glace que le Kaw-djer pouvait maintenant employer sans ménagement. Puis, lorsque cette période aiguë se résolut enfin, le malade était si faible que sa vie paraissait ne tenir qu’à un fil.

À dater de ce jour, toutefois, la convalescence fit de rapides progrès. Le meilleur des remèdes fut, pour lui, d’apprendre que Sand était également sauvé. À cette nouvelle, le visage de Dick s’illumina d’une joie céleste, et, pour la première fois depuis tant de jours, il s’endormit d’un paisible sommeil.

Dès le lendemain, il put assurer lui-même Sand qu’on ne l’avait pas trompé, et celui-ci, à partir de cet instant, fut délivré de tout souci. Quant à son malheur personnel, il en faisait bon marché. Rassuré sur le sort de Dick, il réclama aussitôt son violon, et, lorsqu’il tint entre ses bras l’instrument chéri, il parut au comble du bonheur.

Quelques jours plus tard, il fallut céder aux instances des deux enfants et les réunir dans la même pièce. Dès lors, les heures coulèrent pour eux avec la rapidité d’un rêve. Dans leurs couchettes placées proches l’une de l’autre, Dick lisait tandis que