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poudre à l’endroit qu’il occupait antérieurement dans l’entrepôt.

Il put ainsi constater qu’un autre des tonnelets avait disparu. En y comprenant celui qu’il avait trouvé dans la salle du Tribunal, il n’en restait que quatre, au lieu de cinq. Que voulait-on faire de cette poudre ? Pas un bon usage assurément. Pourtant, en l’absence de toute arme à feu, elle n’était guère utilisable, les voleurs devant bien supposer qu’on allait rendre impossible une tentative semblable à celle qu’un hasard favorable venait de faire échouer.

Dès qu’Hartlepool fut de retour, les deux maçons improvisés remirent en place le morceau de madrier coupé par Kennedy, puis le vide fut bouché comme précédemment avec des pierrailles noyées dans du mortier. Bientôt il ne subsista aucune trace de l’attentat. Alors seulement le Kaw-djer se retira chez lui, en se faisant suivre d’Hartlepool qu’il informa de la disparition d’un second baril de poudre.

La chose méritait considération. Puisque les coupables s’étaient emparés de cette poudre, c’est qu’ils méditaient de recommencer leur tentative, et il convenait d’aviser aux moyens de se protéger contre eux.

Après que la question eut été examinée sous toutes ses faces, il fut définitivement convenu que l’attentat ne serait pas ébruité, et qu’on agirait avec prudence de façon à ne pas attirer l’attention. En premier lieu, on résolut d’augmenter les forces de police et de les porter de quarante à soixante hommes, en attendant mieux, si la nécessité en était ultérieurement démontrée. Pour l’instant, il faudrait se contenter de huit gardes supplémentaires, puisqu’on ne possédait en réserve que ce nombre d’armes à feu, mais il fut entendu que le Kaw-djer ferait venir deux cents nouveaux fusils de manière à pouvoir parer dans l’avenir à toutes les éventualités. Il s’était créé à Libéria des intérêts déjà considérables et qui grandissaient de jour en jour. Il importait d’être en mesure de les défendre au besoin.

On convint, en outre, que les hommes de veille monteraient dorénavant leur garde en plein air et non dans le poste de police. Ils se relèveraient deux par deux et, pendant leur faction, feraient les cent pas autour du gouvernement, qui serait ainsi à l’abri d’une surprise.

Le Kaw-djer ne crut pas devoir s’arrêter pour l’instant à