— Si, gouverneur, mais ça ne fait rien… »
Dick gonfla ses joues, puis imitant le Kaw-djer lui-même à s’y méprendre malgré la réduction de l’échelle, il dit avec une impayable gravité :
— Le travail est la loi !
Sourire ou se fâcher ?… Le Kaw-djer prit le parti de sourire. Aucune hésitation n’était possible, en effet. Dick n’avait évidemment nulle intention de railler. Dès lors, pourquoi blâmer ces deux enfants si ardents à se « débrouiller », alors que tant de leurs aînés avaient une telle propension à s’en reposer sur autrui.
Il demanda :
— Votre « travail » vous rapporte-t-il au moins de quoi vivre ?
— Je crois bien ! affirma Dick avec importance. Des douze cents, par jour, quelquefois quinze, voilà ce qu’il nous rapporte, notre travail, gouverneur !… Avec ça, un homme peut vivre, ajouta-t-il le plus sérieusement du monde.
Un homme !… Les auditeurs partirent d’un éclat de rire, Dick, offensé, regarda les rieurs.
— Qu’est-ce qu’ils ont, ces idiots-là ? murmura-t-il entre ses dents d’un air vexé.
Le Kaw-djer le ramena à la question.
— Quinze cents, ce n’est pas mal, en effet, reconnut-il. Vous gagneriez davantage cependant, si vous aidiez les maçons ou les terrassiers.
— Impossible, gouverneur, répliqua Dick vivement.
— Pourquoi impossible ? insista le Kaw-djer.
— Sand est trop petit. Il n’aurait pas la force, expliqua Dick, dont la voix exprima une véritable tendresse qui ne laissait pas d’être nuancée d’un soupçon de dédain.
— Et toi ?
— Oh !… moi !…
Il fallait entendre ce ton !… Lui, il aurait la force, assurément. C’eût été lui faire injure que d’en douter.
— Alors ?…
— Je ne sais pas… balbutia Dick tout songeur. Ça ne me dit rien…
Puis, dans une explosion :
— Moi, gouverneur, j’aime la liberté !
Le Kaw-djer considérait avec intérêt le petit bonhomme, qui,