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d’une crique bien abritée des mauvais temps du large. Rien n’était modifié à leur vie antérieure. Le seul changement qu’ils lui apportèrent, fut de remplacer par une habitation solide l’ajoupa primitive qui leur avait assuré jusqu’ici un insuffisant abri. Maintenant qu’il n’était plus question de quitter l’île Hoste, il convenait de s’installer d’une manière moins rudimentaire que par le passé.

Le Kaw-djer avait, en effet, signifié à Karroly sa volonté de ne plus retourner à l’Île Neuve. Puisqu’il existait encore une terre libre, il y vivrait jusqu’à son dernier jour. Halg fut ravi de cette décision qui cadrait si bien avec ses désirs. Quant à Karroly, il se conforma comme de coutume à la volonté de celui qu’il considérait comme son maître, sans faire aucune objection, bien que sa nouvelle résidence dût grandement diminuer les occasions de pilotage.

Cet inconvénient n’avait pas échappé au Kaw-djer, mais il en acceptait les conséquences. Sur l’île Hoste, on vivrait uniquement de chasse et de pêche, voilà tout, et, si cette ressource était, à l’usage, reconnue insuffisante, il serait temps alors d’aviser à d’autres expédients. Décidé, en tous cas, à ne rien devoir qu’à lui-même, il refusa de prendre sa part de provisions.

Il ne poussa pas le renoncement, cependant, jusqu’à dédaigner les maisons démontables, que le départ de leurs habitants avaient rendues libres en grand nombre. L’une de ces maisons, transportée par fractions sur la rive gauche, y fut réédifiée, puis renforcée par des contre-murs qui furent bâtis en peu de jours. Quelques-uns des ouvriers avaient offert spontanément leur concours au Kaw-djer qui l’accepta sans façon. Le travail terminé, ces braves gens ne songèrent pas à réclamer de salaire, et leur abstention était trop conforme aux principes du Kaw-djer pour que celui-ci pût avoir la pensée de leur en offrir un.

La maison terminée, Halg et Karroly embarquèrent sur la Wel-Kiej et se rendirent à l’Île Neuve, d’où ils rapportèrent, trois semaines plus tard, les objets mobiliers contenus dans l’ancienne demeure. Un pilotage, trouvé en route par Karroly, avait prolongé leur absence et permis en même temps à l’Indien de se procurer des vivres et des munitions en quantité suffisante pour la prochaine saison d’hiver.

Après leur retour, la vie prit son cours régulier. Karroly et