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QUELQUES JOURS DE NAVIGATION.

et laisse à l’arrière un onduleux sillage d’écume. Le capitaine allait et venait, jetant un rapide regard sur l’habitacle placé devant l’homme de barre, et échangeant quelques paroles avec ses passagers. Une moitié de l’équipage était de quart à l’avant ; l’autre se reposait dans le poste, après avoir reçu la ration du matin. Plusieurs lignes avaient été mises à la traîne, et, à l’heure du repas de midi, elles ne remonteraient point sans ramener quelques-uns de ces poissons si multipliés en ces mers.

Il faut savoir aussi que les parages de la Nouvelle-Zélande sont très fréquentés des baleines. Cette pêche s’y exerce avec grand succès. Autour du brick, dans cette vaste baie, apparurent un certain nombre de souffleurs qu’il eût été facile d’amarrer.

Ce qui conduisit M. Hawkins à dire au capitaine, tandis qu’ils regardaient s’ébattre ces énormes mammifères :

« J’ai toujours eu le désir de mener de pair la pêche et le cabotage, Gibson, et je pense qu’il y a autant de bénéfice à tirer de l’une que de l’autre.

— Possible, répondit le capitaine, et les baleiniers qui visitent ces mers remplissent aisément leurs cales de barils d’huile, de lard et de fanons.

— On racontait à Wellington, fit observer Nat Gibson, que les baleines se laissent capturer plus aisément ici que partout ailleurs…

— C’est vrai, dit le capitaine, et cela tient à ce qu’elles n’ont pas l’ouïe aussi exercée que celles des autres espèces. Il est donc possible de les approcher à portée de harpon. En somme, toute baleine signalée est baleine prise, à moins que le mauvais temps ne s’en mêle. Par malheur, les coups de vent sont non moins nombreux que terribles dans ces mers…

— Entendu, répondit M. Hawkins, un jour ou l’autre, nous armerons en pêche…