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LES FRÈRES KIP

que fut sa colère, Vin Mod ne le calma pas sans peine, et lui aussi vouait à la potence ces misérables ivrognes !… Mais enfin, rien n’était perdu… Ce qui ne pouvait se faire cette nuit se ferait la nuit prochaine… On veillerait sur Kyle et Sexton… On les empêcherait de boire… Dans tous les cas, Flig Balt se garderait bien de les dénoncer au capitaine, ni pour la soûlerie, ni pour le vol de la bouteille… M. Gibson les enverrait à fond de cale jusqu’à l’arrivée du brick à Wellington, les remettrait entre les mains des autorités maritimes et débarquerait peut-être par surcroît Len Cannon et Kyle, ainsi que le fit observer Vin Mod… C’était parler sagement. D’autre part, les matelots ne se dénoncent pas entre eux. Ni Hobbes, ni Wickley, ni Burnes, ni même le mousse ne parleraient, et le capitaine n’aurait point à intervenir.

La nuit s’écoula, et la tranquillité ne fut point troublée à bord du James-Cook.

Lorsque Harry Gibson monta de grand matin sur le pont, il constata que les hommes de quart étaient à leur poste, et le brick en bonne direction par le travers de Christchurch, après avoir doublé la presqu’île de Banks.

Cette journée du 27 s’annonça bien. Le soleil déborda d’un horizon dont les brumes se dissipèrent promptement. Un instant on put croire que la brise s’établirait au large ; mais, dès sept heures, elle vint de terre, et, sans doute, se maintiendrait au nord-ouest comme la veille. En pinçant le vent, le James-Cook pourrait atteindre le port de Wellington sans changer ses amures.

« Rien de nouveau ?… demanda M. Gibson à Flig Balt, lorsque le maître d’équipage sortit de sa cabine, où il avait passé les dernières heures de la nuit.

— Rien de nouveau, monsieur Gibson, répondit-il.

— Qui est à la barre ?…

— Le matelot Cannon.