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LES FRÈRES KIP

départ du steamer… Aussi n’avons-nous plus qu’à patienter… Dès qu’il fera nuit, le canot accostera la pointe…

— Dieu le veuille ! » répondit O’Brien.

Vers une heure de l’après-midi, se produisit une vive alerte. Des voix furent distinctement entendues sur le rebord de la falaise, à cent pieds à peine au-dessus de l’anfractuosité qui abritait les trois fugitifs. En même temps éclataient des aboiements de chiens surexcités par leurs maîtres !

« Les constables… les dogues ! s’écria Farnham. Voilà le plus grand danger ! »

Il était à craindre, en effet, que ces animaux ne descendissent sur la grève, où les constables les suivraient par le sentier que Farnham avait pris la veille. Là, ces chiens se mettraient en quête… leur instinct les guiderait vers le bas de la falaise… ils finiraient par découvrir l’anfractuosité… Et quelle résistance O’Brien, Macarthy, Farnham, pourraient-ils opposer à une douzaine d’hommes armés, alors qu’eux étaient sans armes ?… On aurait vite fait de les saisir, de les reconduire au pénitencier… Et ils ne savaient que trop quel sort les y attendait !… La double chaîne et le cachot pour O’Brien et Macarthy !… La mort pour Farnham, convaincu d’avoir favorisé leur fuite !

Tous trois restaient immobiles au fond de la cavité. En sortir n’était plus possible, sans être vu. Et, où se réfugier ailleurs que sur les dernières roches de la pointe ?… Alors, pour ne pas retourner au bagne, ils n’auraient qu’à se jeter à la mer !… Oui ! tout plutôt que de retomber entre les mains des constables !…

Cependant les voix arrivaient jusqu’à eux. Ils entendaient les propos échangés sur la crête de la falaise, les cris de ceux qui les poursuivaient, et auxquels se mêlait le furieux aboiement des dogues.

« Par ici… par ici !… répétait l’un.