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LES FRÈRES KIP

avoir voulu arracher notre pays aux oiseaux de proie de l’Angleterre !… Et, au dehors, des amis se sont occupés de préparer notre délivrance… Mais Karl et Pieter Kip… c’est pour la vie qu’ils sont enfermés là !… Ah ! tenez, lorsqu’ils sont venus à nous, lorsqu’ils nous ont remis le billet trouvé par eux… j’aurais dû leur dire : « Fuyons ensemble !… Nos compatriotes vous accueilleront comme des frères !… »

La nuit s’avançait, toujours pluvieuse et glaciale. Les fugitifs souffraient du froid, et, cependant, ce n’était pas sans les plus vives appréhensions qu’ils attendaient le jour. Des aboiements qui arrivaient parfois à leur oreille indiquaient que les chiens avaient été lâchés à travers la presqu’île. Habitués à flairer de loin les convicts, à reconnaître l’accoutrement du bagne, ces animaux ne découvriraient-ils pas l’anfractuosité où se cachaient Farnham et ses compatriotes ?…

Un peu après minuit, la grève était entièrement couverte par la marée montante sous la poussée des vents d’ouest. La mer se gonfla au point que la base de la falaise fut battue par le flot. Pendant une demi-heure, les fugitifs furent inondés jusqu’à mi-jambe. Heureusement, le niveau ne s’éleva pas au delà, et le jusant entraîna les eaux malgré la résistance de la rafale.

Avant le lever du jour, la tempête montra une tendance à diminuer. Le vent peu à peu halait le nord, rendant la baie plus praticable. Farnham, O’Brien et Macarthy pouvaient donc espérer que la mer ne tarderait pas à tomber. Lorsque le jour revint, l’amélioration était sensible. Si les lames déferlaient encore au-delà des récifs, une embarcation aurait sans trop de peine accosté la pointe Saint-James à son revers.

D’ailleurs, il fallait attendre le soir avant de s’aventurer sur la grève.

Farnham fit trois parts des aliments qu’il avait apportés, le pain et la viande sèche. Il convenait de les ménager, en prévision de