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LES FRÈRES KIP

il ne le perdit pas des yeux. En même temps, un signe qu’il fît aux deux fenians leur indiqua que c’était bien l’homme attendu. Que venait-il faire, et pourquoi cherchait-il à se rapprocher de Farnham, si ce n’est pour lui donner avis de l’arrivée du steamer, pour convenir du jour et de l’endroit où l’évasion devrait s’effectuer ?

Le chef des constables, qui dirigeait les escouades, était un homme brutal, soupçonneux, d’une extrême sévérité dans le service. Sans paraître suspect, Farnham n’aurait pu entrer en conversation avec Walter. Celui-ci l’avait compris, et, après plusieurs tentatives inutiles, il se décida à procéder selon ce qui avait été préalablement convenu.

Dans sa poche, un billet tout préparé contenait les indications suffisantes. L’ayant montré de loin à Farnham, il alla vers un des arbres qui bordaient la route, à une cinquantaine de pas de là, et cueillit une feuille, dont il enveloppa le billet qu’il déposa au pied de l’arbre.

Walter, faisant alors un dernier geste, qui fut compris de Farnham, redescendit vivement la route, et disparut dans la direction de Port-Arthur.

Les fenians n’avaient pas perdu un seul des mouvements de cet homme. Mais que faire ?… Ce billet, ils ne pouvaient le ramasser sans risquer d’être vus…

C’était donc à Farnham d’agir, non sans d’extrêmes précautions. Aussi dut-il attendre que les convicts eussent achevé leur travail de ce côté de la clairière.

Or, par mauvaise chance, le chef des constables venait précisément d’y envoyer une des escouades, et ce n’était pas celle que surveillait Farnham.

On imagine aisément ce que devait être son inquiétude et celle de ses compatriotes. Ils se trouvaient à plus de deux cents pas de la route, dont les autres convicts occupaient la lisière !