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LES FRÈRES KIP

et ses enfants n’avaient jamais aucun rapport avec le personnel des pénitenciers. Seul le capitaine arrivait chaque matin, pour la plus grande partie de la journée, et ne revenait à la villa que le soir. Chaque mois, il faisait quelques tournées d’inspection à l’intérieur de la presqu’île jusqu’à l’isthme d’Eagle-Hawk-Neck, visitant les différents postes, passant en revue les escouades employées au travail des routes. Quant à sa famille, en outre des promenades effectuées autour de Port-Arthur, à travers les admirables forêts environnantes, l’aviso les transportait à Hobart-Town, quand elle le désirait, et ses relations n’étaient pas interrompues avec la capitale tasmanienne.

Dès son arrivée au pénitencier de Point-Puer, le commandant se faisait amener les enfants qui avaient commis quelque méfait la veille, il les admonestait, il leur appliquait les peines réglementaires. Et que l’on juge du degré de perversion auquel atteignaient parfois ces petits monstres ! L’un d’eux, qui en voulait à un constable, répondait, lorsqu’on lui faisait entrevoir la potence dans un prochain avenir s’il ne s’amendait pas : « Eh bien ! mon père et ma mère m’auront montré le chemin, et, avant d’être pendu, je tuerai ce constable ! »

Après la visite à Point-Puer, M. Skirtle se rendait au pénitencier des hommes, et ce fut là, le matin du 5 avril, que Karl et Pieter Kip comparurent devant lui.

Le capitaine était au courant de ce procès dont le retentissement avait été considérable, — procès terminé par la condamnation à mort des accusés. Que la Reine leur eût fait grâce de la vie, le crime d’assassinat, et dans des conditions qui le rendaient plus odieux encore, n’en pesait pas moins sur eux. Ils devraient donc être traités avec une sévérité extrême, et aucun adoucissement ne saurait être apporté à leur situation.

Et, cependant, le commandant ne put qu’être frappé de l’atti-