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LES FRÈRES KIP

télégramme officiel une proposition de recours en grâce auprès de Sa Majesté.

Le 7 mars, le bruit se répandit par la ville que le pourvoi formé par les frères Kip avait été rejeté. La nouvelle était vraie ; elle ne provoqua aucun sentiment de surprise. Depuis le début de l’affaire, on s’attendait à une condamnation, même à une condamnation capitale, et personne n’eût mis en doute qu’elle ne fût suivie d’une exécution.

D’ailleurs, personne ne pensait que le gouverneur de la Tasmanie dût intervenir près de la Reine, ni que M. Hawkins eût fait près de lui de si pressantes démarches à cet effet.

La population d’Hobart-Town comptait donc que l’exécution serait prochaine, et l’on sait combien, chez les races saxonnes comme chez les races latines, ces supplices provoquent d’irrésistibles et malsaines curiosités.

Si, d’après les lois anglaises, la pendaison des condamnés n’est pas faite en place publique, mais seulement en présence de personnes désignées, c’est déjà un progrès. Toutefois la foule ne s’en amasse pas moins aux abords de la prison.

Aussi, à partir du 7 mars, avant le lever du soleil, et même dès les premières heures après minuit, d’innombrables curieux affluaient-ils pour voir hisser le pavillon noir qui marque l’instant du supplice.

Et, parmi eux, s’étonnera-t-on que Flig Balt et Vin Mod fussent là, et aussi Len Cannon et ses camarades, qui n’avaient pas quitté Hobart-Town ?… Oui ! c’était de leurs propres yeux que le maître d’équipage et son complice voulaient voir redescendre le pavillon, après l’exécution de la sentence !… Ils seraient alors certains que d’autres avaient payé pour eux la dette de leur crime !… Il n’y aurait plus lieu de revenir sur cette affaire, et ces deux misérables retourneraient avec leurs compagnons au tap des Fresh-