Page:Verne - Les Frères Kip, Tome I et II, 1903.djvu/363

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
339
EN ATTENDANT L’EXÉCUTION.

meurtre dont ils ne sont pas coupables, et que j’attribue à quelque indigène de Kerawara…

— Mais il y a un autre témoignage que celui de Flig Balt, mon cher Hawkins…

— Le témoignage du mousse Jim, monsieur le gouverneur, et je l’accepte tel qu’il a été fait, car ce jeune garçon est incapable de mentir… Oui ! Jim a vu, dans la cabine de Karl et de Pieter Kip, ce poignard qu’ils ne savaient pas être en leur possession… Mais est-ce bien l’arme qui a servi au meurtre, et ce fait de la virole n’est-il pas dû à une coïncidence toute fortuite !…

— Il a pourtant sa valeur, et ne convenait-il pas d’en tenir compte, mon cher Hawkins ?…

— Assurément, monsieur le gouverneur, et il a dû déterminer la conviction du jury… Cependant, je le répète, tout le passé des frères Kip plaide en leur faveur… Pour vous parler ainsi, il faut que j’oublie la douleur que m’a causée la mort de mon pauvre ami Gibson, et qui aurait pu me mettre un bandeau sur les yeux, comme à son fils que je plains et que j’excuse !… Moi… moi… je perçois la vérité au milieu des obscurités de cette affaire, et j’ai l’entière conviction qu’elle éclatera un jour ! »

Il fut visible que le gouverneur se sentait très impressionné par les déclarations de M. Hawkins, dont il connaissait la nature probe et droite. Sans doute, son argumentation ne reposait que sur une base morale, mais, enfin, dans les causes de ce genre, les preuves matérielles ne sont pas tout, et il convient de tenir compte des autres.

Sir Edward Carrigan, après quelques instants de silence, répondit en ces termes :

« Je comprends… je saisis, mon cher Hawkins, toute la valeur de votre opinion… Et maintenant, je vous demanderai… : Qu’attendez-vous de moi ?…