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LES FRÈRES KIP

congédier cet être sournois, vindicatif, méchant, — en outre malpropre, — sur lequel les réprimandes et les punitions ne produisaient aucun effet. Du reste, Flig Balt avait raison de le ranger parmi ceux qui n’hésiteraient pas à se révolter contre le capitaine. Vin Mod et lui s’entendaient bien. Le maître d’équipage le ménageait, l’excusait, ne le punissait que lorsqu’il ne pouvait faire autrement. Koa savait qu’il serait débarqué dès l’arrivée à Hobart-Town, et, plus d’une fois, il avait menacé de se venger. Donc, Flig Balt, Vin Mod et lui, aidés des quatre nouveaux introduits à bord, c’étaient sept hommes en face de M. Gibson, des trois autres matelots et du mousse. Il est vrai, M. Hawkins, l’armateur, et Nat Gibson devaient prendre passage sur le brick à Wellington, et la proportion serait moins inégale. Mais il était possible que Flig Balt parvint à s’emparer du navire entre Dunedin et Wellington pendant la traversée, de si courte durée qu’elle dût être. Si l’occasion se présentait, Vin Mod ne la laisserait pas perdre.

Le James-Cook, en cours de cabotage depuis quatre mois, était chargé pour différents ports, où il avait débarqué et embarqué ses cargaisons avec des frets avantageux. Après avoir successivement touché à Malikolo, à Merèna et à Eromanga des Nouvelles-Hébrides, puis à Vanoua Linon des Fidji, il regagnerait Wellington, où M. Hawkins et Nat Gibson l’attendaient. Puis il ferait voile pour les archipels de la Nouvelle-Guinée, bien pourvu d’objets de pacotille destinés aux indigènes, et il en rapporterait de la nacre et du coprah pour une valeur de dix à douze mille piastres. C’est de là que s’effectuerait le retour à Hobart-Town, avec relâches à Brisbane ou à Sydney, si les circonstances l’exigeaient. Encore deux mois, et le brick serait rentré à son port d'attache.

On conçoit donc combien les retards subis à Dunedin avaient contrarié M. Gibson. M. Hawkins savait à quoi s’en tenir à cet égard, grâce aux lettres et télégrammes échangés entre Dunedin et