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PORT-PRASLIN.

Hollandais. Mais il était convenu, on le sait, et sur leur demande, qu’ils ne quitteraient point leur cabine du brick.

Un peu avant midi, arriva M. Gibson, accompagné du matelot Burnes. Celui-ci portait différents objets offerts par M. Hawkins à Mme Zieger, des étoffes, de la lingerie, un joli bracelet, qui lui fit grand plaisir. Inutile de dire que le capitaine fut reçu, lui aussi, à bras ouverts.

On se mit à table, et ce déjeuner, bien servi, fut particulièrement goûté de convives doués d’un furieux appétit. Les plats de résistance, c’étaient la basse-cour et la baie de Port-Praslin qui les avaient fournis. Quant aux légumes : choux-palmistes, ignames, patates douces, laka, succulent produit de l’inocarpe, et aux fruits ; bananes, oranges, noix de coco, c’est de l’enclos même qu’ils venaient. Pour les boissons fermentées, il n’y avait eu qu’à les monter d’une bonne cave, qu’alimentaient de vins de France et d’Allemagne les navires à destination de Neu-Mecklenburg.

On fit compliment à Mme Zieger sur l’excellence de sa table, qui pouvait rivaliser avec les meilleures d’Hobart-Town, et l’aimable hôtesse parut très sensible à ces compliments.

« Il n’y a qu’un mets que je ne puisse plus vous offrir, mes chers amis, dit M. Zieger, parce qu’on ne le fabrique plus dans le pays…

— Et lequel ? s’informa M. Hawkins.

— Un pâté composé de sagou, de noix de coco et de cervelle humaine…

— Et c’était bon ?… s’écria Nat Gibson.

— Le roi des pâtés !

— Vous en avez mangé ?… demanda en riant M. Hawkins.

— Jamais, et je n’aurai plus jamais l’occasion de le faire…

— Voilà ce que c’est, s’écria le capitaine, que d’avoir détruit le cannibalisme dans l’archipel !…