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LES DEUX FRÈRES.

aventuriers dont la rencontre est trop fréquente en ces parages du Pacifique.

Les deux frères ne faisaient point partie de l’équipage de la goélette, Ils étaient donc des passagers, et les seuls très probablement qui se fussent tirés sains et saufs de cet abordage. Aussi Vin Mod revenait-il plus irrité encore à la pensée que ses projets ne pourraient être mis à exécution.

Le canot accosta. M. Gibson, son fils, les naufragés, montèrent sur le pont. Ces derniers furent aussitôt présentés à M. Hawkins, qui ne dissimula point son émotion, à voir en quel état misérable ils se trouvaient. Après leur avoir tendu la main :

« Soyez les bienvenus, mes amis ! » dit-il.

Les deux frères, non moins impressionnés, avaient voulu se jeter à ses genoux : il les en empêcha.

« Non… reprit-il, non !… nous sommes trop heureux… »

Les mots lui manquaient, à cet excellent homme, et il ne put qu’approuver Nat Gibson qui cria : « À manger… qu’on leur donne à manger !… Ils meurent de faim ! »

Les deux frères furent conduits dans le carré, où le premier déjeuner était servi, et là ils purent se refaire, après quinze longs jours de privations et de souffrance.

Alors M. Gibson mit à leur disposition une des cabines latérales où étaient déposés des vêtements choisis dans la rechange de l’équipage. Puis, leur toilette achevée, ils revinrent à l’arrière, et là, en présence de M. Hawkins, du capitaine et de son fils, ils racontèrent leur histoire.

Ces hommes étaient Hollandais, originaires de Groningue. Ils s’appelaient Karl et Pieter Kip. Karl, l’aîné, officier de la marine marchande des Pays-Bas, avait fait déjà de nombreuses traversées en qualité de lieutenant, puis de second à bord des navires de commerce. Pieter, le cadet, était associé dans un comptoir d’Am-