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EN VUE DE L’ÎLE NORFOLK.

Les deux matelots appuyèrent sur les avirons. En vingt minutes, le canot eut rallié le James-Cook. Puis, le capitaine, se défiant toujours d’une partie de son équipage, eut soin de faire remonter l’embarcation à son poste.

La pêche fut bien accueillie par M. Hawkins, et, comme il s’intéressait à l’histoire naturelle, il put à loisir étudier ces blennies, dont il n’avait jamais eu aucun échantillon entre les mains. Nat Gibson fit part à son père de ce qu’il croyait avoir aperçu au moment où il se déhalait des bancs de corail.

Le capitaine et l’armateur prêtèrent grande attention au récit du jeune homme. Ils n’ignoraient pas que, depuis l’abandon de l’île comme lieu de détention, elle devait être déserte, et les indigènes des archipels voisins, Australiens, Maoris ou Papouas, n’avaient jamais eu la pensée de s’y fixer.

« Il est possible, toutefois, que des pêcheurs soient sur ces parages, fit remarquer Flig Balt, qui prenait part à la conversation.

— En effet, répondit l’armateur, et ce ne serait pas étonnant à cette époque de l’année…

— Est-ce que tu as vu quelque embarcation en dedans des récifs ?… demanda le capitaine à son fils.

— Aucune, père.

— Je pense alors, reprit le maître d’équipage, que M. Nat se sera trompé… La soirée était déjà sombre… Donc, à mon avis, capitaine, si le vent se lève cette nuit, nous ferions bien d’appareiller. »

On le comprend, Flig Balt, déjà très contrarié de la présence de M. Hawkins et de Nat Gibson à bord du brick, ne devait rien craindre tant que l’embarquement de nouveaux passagers. En ces conditions, il serait contraint de renoncer à ses projets — ce qu’il n’entendait pas faire. Ses complices et lui étaient formellement