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n’y atterrissait, qui n’y fût jeté malgré lui par les ouragans de l’Atlantique.

En 1697, trois bâtiments hollandais de la Compagnie des Indes y relâchèrent, et en déterminèrent les coordonnées, laissant au grand astronome Halley le soin de revoir leurs calculs en l’an 1700. De 1712 à 1767, quelques navigateurs français en eurent connaissance, et principalement la Pérouse, que ses instructions y conduisirent pendant son célèbre voyage de 1785.

Ces îles, si peu visitées jusqu’alors, étaient demeurées désertes, quand, en 1811, un Américain, Jonathan Lambert, entreprit de les coloniser. Lui et deux compagnons y abordèrent au mois de janvier, et firent courageusement leur métier de colons. Le gouverneur anglais du cap de Bonne-Espérance, ayant appris qu’ils prospéraient, leur offrit le protectorat de l’Angleterre. Jonathan accepta, et hissa sur sa cabane le pavillon britannique. Il semblait devoir régner paisiblement sur « ses peuples, » composés d’un vieil Italien et d’un mulâtre portugais, quand, un jour, dans une reconnaissance des rivages de son empire, il se noya ou fut noyé, on ne sait trop. 1816 arriva. Napoléon fut emprisonné à Sainte-Hélène, et, pour le mieux garder, l’Angleterre établit une garnison à l’île de l’Ascension, et une autre à Tristan d’Acunha. La garnison de Tristan consistait en une compagnie d’artillerie du Cap et un détachement de Hottentots. Elle y resta jusqu’en 1821, et, à la mort du prisonnier de Sainte-Hélène, elle fut rapatriée au Cap.

« Un seul Européen, ajouta Paganel, un caporal, un Écossais…

— Ah ! un Écossais ! dit le major, que ses compatriotes intéressaient toujours plus spécialement.

— Il se nommait William Glass, répondit Paganel, et resta dans l’île avec sa femme et deux Hottentots. Bientôt, deux Anglais, un matelot et un pêcheur de la Tamise, ex-dragon dans l’armée argentine, se joignirent à l’Écossais, et enfin, en 1821, un des naufragés du Blendon-Hall, accompagné de sa jeune femme, trouva refuge dans l’île Tristan. Ainsi donc, en 1821, l’île comptait six hommes et deux femmes. En 1829, elle eut jusqu’à sept hommes, six femmes et quatorze enfants. En 1835, le chiffre s’élevait à quarante, et maintenant il est triplé.

— Ainsi commencent les nations, dit Glenarvan.

— J’ajouterai, reprit Paganel, pour compléter l’histoire de Tristan d’Acunha, que cette île me paraît mériter autant que Juan Fernandez la renommée d’île à Robinsons. En effet, si deux marins furent successivement abandonnés à Juan Fernandez, deux savants faillirent l’être à Tristan d’Acunha. En 1793, un de mes compatriotes, le naturaliste Aubert Dupetit-