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à bord du « foot ball ».

compter sur le pont, tout encombré des baraquements qui renfermaient les animaux, bœufs, chevaux, ânes, rennes, et sillonné en tous sens par la meute des chiens, qui circulaient en hurlant au milieu de groupes pitoyables, hommes encore jeunes mais frappés du stigmate de la misère, femmes épuisées entourées d’enfants souffreteux. Ce n’est pas pour exploiter quelque gisement à leur compte qu’ils émigraient, ceux-là, mais pour mettre leurs bras au service des syndicats dont ils se disputeraient les salaires.

« Enfin, dit Summy Skim, au moment où le paquebot sortait de la rade, tu l’as voulu, Ben. Cette fois, nous voici bien en route pour l’Eldorado. Nous faisons partie, nous aussi, de ce monde des chercheurs d’or, qui ne paraît pas être des plus recommandables.

— Il serait difficile qu’il en fût autrement, mon cher Summy, répondit Ben Raddle. Il faut le prendre tel qu’il est.

— J’aimerais bien mieux ne pas le prendre du tout, répliqua Summy. Que diable ! Ben, nous ne sommes pas de ces gens-là. Que nous ayons hérité d’un claim, soit ! Que ce claim soit truffé de pépites, j’y consens ! Ce n’est pas une raison pour nous muer en chercheurs d’or.

— C’est entendu, répondit Ben Raddle avec un imperceptible mouvement d’épaules qui ne rassura guère Summy Skim.

Et celui-ci d’insister :

— Nous allons au Klondike pour vendre le claim de notre oncle Josias, c’est bien convenu, n’est-ce pas ?.. Seigneur ! rien qu’à cette pensée que nous pourrions partager les instincts, les passions, les mœurs de cette cohue d’aventuriers !..

— Attention ! dit Ben Raddle en raillant, tu vas prêcher, Summy !

— Et pourquoi pas, Ben ? Oui, j’en ai horreur de cette exécrable soif de l’or, de cet affreux désir de richesses qui font braver tant de misères. C’est du jeu, cela. C’est la course au gros lot, à la grosse pépite… Ah ! quand je songe qu’au lieu de naviguer à