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le volcan d’or.

lioration dans l’état de Jacques Ledun. Sa faiblesse était toujours la même, et on pouvait craindre qu’il lui fût impossible de réagir. Cependant, à de longs intervalles, en ménageant ses efforts, il put parler de nouveau et répondre à des questions qu’il paraissait provoquer. On sentait qu’il y avait bien des choses qu’il désirait dire.

Peu à peu, on parvint ainsi à connaître l’histoire de ce Français, autant d’après ce qu’il raconta volontairement dans ses instants lucides que par ce qu’on réussit à comprendre dans ses moments de délire. Certaines circonstances de sa vie demeuraient toutefois entourées de mystère. Que faisait-il au Klondike ? D’où venait-il, où allait-il, quand il était tombé aux portes de Dawson ? On n’avait aucun renseignement sur ce sujet.

Âgé de quarante-deux ans, d’une constitution robuste qui n’avait pu être altérée à ce point que par les plus atroces privations, Jacques Ledun était un Breton de Nantes.

Sa mère, veuve d’un agent de change ruiné en des spéculations hasardeuses, demeurait encore dans cette ville, où elle soutenait contre la misère grandissante une lutte chaque jour plus inégale.

Dès l’enfance, Jacques Ledun avait eu la vocation de la mer. Une grave maladie, survenue au moment où il allait passer les examens de l’École navale l’avait arrêté aux premiers pas de cette carrière. Ayant dépassé l’âge réglementaire, il dut s’engager comme pilotin à bord d’un navire de commerce, et, après quelques voyages à Melbourne, aux Indes et à San Francisco, il se fit recevoir capitaine au long cours. C’est à ce titre qu’il était entré comme enseigne auxiliaire dans la marine militaire.

Son service dura trois ans, au bout desquels comprenant que, à moins de circonstances rares où peut se distinguer un marin, il n’aurait jamais l’avancement de ses camarades sortis du Borda, il donna sa démission et chercha une position dans la marine marchande.