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le chilkoot.

démontables excédaient la largeur du sentier. De là nécessité d’en décharger les véhicules, et de les faire haler une à une par les bêtes de trait. De là, aussi, une perte de temps considérable pour les autres attelages.

En d’autres endroits, la rampe était si rude, que l’angle d’inclinaison dépassait quarante-cinq degrés. Bien que ferrés à glace, les animaux, alors, se révoltaient ou, tout ou moins, se dérobaient. On ne pouvait les décider à attaquer la montée qu’à grand renfort de cris et de fouet, et les crocs de leurs fers laissaient de profondes empreintes sur la neige, tachée de gouttelettes de sang.

Vers cinq heures du soir, le Scout arrêta la caravane. Les mules exténuées étaient dans l’incapacité de faire un pas de plus, bien que leur charge fût faible relativement à tant d’autres. Sur la droite de la passe, s’évidait une sorte de ravin, où des arbres résineux poussaient en grand nombre. Sous leur frondaison, les tentes trouveraient un abri contre les bourrasques que devait faire redouter le relèvement de la température.

Bill Stell connaissait cette place où il avait déjà plus d’une fois passé la nuit. Le campement y fut organisé sur ses indications.

« Vous craignez quelque rafale ? lui demanda Ben Raddle.

— Oui, la nuit sera mauvaise, répondit le Scout, et nous ne saurions prendre trop de précautions contre les tempêtes de neige, qui s’engouffrent ici comme dans un entonnoir.

— Mais, fit observer Summy Skim, nous serons en sûreté, grâce à l’orientation de ce ravin.

— C’est pour cela que je l’ai choisi, » répondit Bill Stell.

L’expérience du Scout ne l’avait pas trompé. La tourmente, qui commença vers sept heures du soir et se prolongea jusqu’à cinq heures du matin, fut terrible. Elle était accompagnée de tourbillons neigeux qui n’eussent pas permis de se voir à deux mètres. On eut grand’peine à maintenir les poêles en activité, car la furie du vent refoulait les fumées à l’intérieur, et