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— Oui, la fièvre de l’or, comme tant d’autres, et on ne la guérit pas avec le sulfate de quinine, car elle n’est point intermittente.

— Rassure-toi, mon cher Summy, répondit Ben Raddle en riant, mon pouls ne bat pas plus vite que d’ordinaire… Je ne voudrais pas l’exposer au contact d’un fiévreux…

— Oh, moi !… je suis vacciné, répondit sur le même ton Summy Skim, et je n’ai rien à craindre. Mais je verrais avec peine que tu te lances…

— Cher ami, il ne s’agit pas de se lancer, il s’agit simplement d’étudier une affaire, et en somme d’en tirer profit s’il y a lieu. Tu dis que notre oncle n’a guère été heureux dans ses spéculations… je le crois, en effet, et très vraisemblablement ce claim de Forty Miles Creek lui aura rapporté plus de boues que de pépites… C’est possible… mais peut-être n’avait-il pas les ressources nécessaires pour l’exploiter… peut-être n’opérait-il pas avec expérience et méthode, comme l’aurait pu faire…

— Un ingénieur, n’est-il pas vrai, Ben ?…

— Sans doute, un ingénieur…

— Toi… par exemple ?…

— Moi… certainement, répondit Ben Raddle. Dans tous les cas, ce n’est pas de cela qu’il est actuellement question… Avant de chercher à se défaire du claim dont la propriété nous revient par héritage, il sera bon, tu l’avoueras, de demander quelques renseignements au Klondike…

— C’est raisonnable en effet, répondit Summy Skim, bien que je ne me fasse aucune illusion sur la valeur de ce 129…

— C’est ce que nous saurons après informations prises, répliqua Ben Raddle. Il est possible que tu aies raison comme il est possible que tu aies tort. Pour conclure, nous allons nous rendre à l’étude de maître Snubbin, nous le chargerons de toutes les démarches, il fera venir les renseignements de Dawson-City par lettre, ou plutôt par dépêche, et, lorsque nous saurons à quoi nous en tenir sur la valeur du claim, nous verrons ce qu’il conviendra de faire. »

La conversation en resta là, et, en somme, Summy Skim ne pouvait rien objecter aux propositions de son cousin. Il était naturel de se renseigner avant de prendre une décision. Que Ben Raddle fût un homme sérieux, intelligent, pratique, cela ne pouvait être mis en doute par Summy Skim. Mais il n’en était pas moins affligé, et inquiet de voir avec quelle ardeur son cousin envisageait l’avenir, avec quelle sorte d’avidité il se jetait sur cette proie si inopinément offerte à son ambition. Et parviendrait-il à le retenir ? Assurément, Summy Skim ne se séparerait pas de Ben Raddle. Leurs intérêts resteraient communs dans cette affaire ! Il persistait à croire qu’elle serait vite réglée, et il en était à désirer que les renseignements

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