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— Le temps… le temps ! murmurait Summy Skim.

— Que voulez-vous, répliqua le docteur Pilcox, c’est la nature qui opère, et, comme vous le savez, elle n’est jamais pressée, la nature ! C’est même pour cela qu’elle a inventé la patience…

— Et la résignation », ajouta sœur Madeleine.

Se résigner, voilà bien ce que Summy Skim aurait de mieux à faire ! Et il voyait bien que la mauvaise saison arriverait avant que Ben Raddle eût été remis sur pied ! Aussi a-t-on idée d’un pays où l’hiver commence dès les premières semaines de septembre, et quel hiver avec ses neiges et ses glaces qui rendent une contrée impraticable ! et comment, à moins d’être absolument guéri, Ben Raddle pourrait-il affronter les fatigues d’un tel voyage par les basses températures du Klondike, franchir les passes du Chilkoot pour aller s’embarquer à Skagway sur les steamboats de Vancouver ?… Quant à ceux qui descendent le Yukon jusqu’à Saint-Michel, le dernier serait parti dans une quinzaine de jours, en laissant les embâcles se former derrière lui !…

Précisément, le Scout, après différentes « conduites » qu’il avait faites pendant cette campagne, revint le 20 de ce mois à Dawson-City.

Le premier soin de Bill Stell fut de s’informer si MM. Ben Raddle et Summy Skim avaient terminé l’affaire relative au claim 129, s’ils en avaient cédé la propriété, et s’ils se préparaient à reprendre la route de Montréal.

Il ne pouvait mieux s’adresser qu’aux deux religieuses, et il se rendit à l’hôpital.

Quelle fut sa surprise, lorsqu’il apprit que Ben Raddle, en traitement, ne pouvait être remis que dans six semaines.

Et quand il se trouva en face de Summy Skim :

« Oui, Bill, lui déclara celui-ci, voilà où nous en sommes ! Non seulement nous n’avons point vendu le 129, mais il n’y a plus de 129 !… Et non seulement il n’y a plus de 129, mais impossible de quitter cet atroce Klondike pour rentrer dans un pays habitable !… »

Le Scout apprit alors, car il l’ignorait, la catastrophe dont cette région du Forty Miles avait été le théâtre, et comment Ben Raddle fut grièvement blessé dans cette circonstance.

« Et c’est ce qu’il y a de plus déplorable, affirma Summy Skim, car enfin, nous en aurions fait notre deuil du 129, et je n’y tenais pas au 129 et quelle idée a eu oncle Josias d’acquérir ce 129 et de mourir pour nous laisser ce 129 !… »

Il fallait entendre Summy Skim énoncer ce nombre, ce « un » suivi d’un « deux » et d’un « neuf » qu’il avait pris en horreur !

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