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le testament d’un excentrique

« J’ai bien le temps ! répondait-il.

— Mais non… pas trop, mon enfant !

— Et puis, mère, à quoi bon se lancer dans cette absurde aventure ?…

— Comment, Max, tu ne voudrais pas courir la chance…

— De devenir un gros millionnaire ?…

— Sans doute, reprenait l’excellente dame, qui rêvait ce que toutes les mères rêvent pour leur fils. Il faut faire tes préparatifs pour le voyage…

— Demain… chère mère… après-demain… tiens !… la veille du départ…

— Mais, mon enfant, dis-moi au moins ce que tu comptes emporter…

— Mes pinceaux, ma boîte à couleurs, mes toiles, sac au dos, comme un soldat.

— Songe donc que tu peux être envoyé à l’extrémité de l’Amérique…

— Des États-Unis, tout au plus, répliquait le jeune homme, et rien qu’avec une valise, je ferais le tour du monde ! »

Impossible d’en tirer d’autre réponse, et il retournait dans son atelier. Mais Mme Réal entendait ne pas lui laisser manquer une si belle occasion de faire fortune.

Quant à Lissy Wag, elle avait tout le temps, puisqu’elle ne devait partir que dix jours après Max Réal. Et c’est bien ce dont se plaignait l’impatiente Jovita Foley.

« Quel malheur, ma pauvre Lissy, répétait-elle, que tu aies eu le numéro cinq !

— Calme-toi, ma chère amie, répondait la jeune fille. Il est aussi bon que les autres… ou même aussi mauvais !

— Ne dis pas cela, Lissy !… N’aie pas de pareilles idées !… Cela nous porterait malheur !

— Voyons, Jovita, regarde-moi bien… Est-ce sérieusement que tu peux croire…