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le testament d’un excentrique.

vages, et tout un réseau de creeks fréquentés par les alligators.

La Nouvelle-Orléans reçut enfin le couple Titbury, le 9 juin au soir, après un voyage de sept jours depuis le départ de Great Salt Lake City. Entre temps, avaient été proclamés les tirages des 4, 6 et 8 juin, concernant Harris T. Kymbale, Lissy Wag et Hodge Urrican. Ils n’étaient pas de nature à améliorer la situation d’Hermann Titbury, puisqu’ils ne lui envoyaient point un remplaçant à l’hôtellerie de la dix-neuvième case.

Ah ! s’il n’avait pas été dans l’obligation de se rendre en cette ruineuse cité, d’y séjourner six semaines, peut-être à sept jours de là les dés l’auraient-ils gratifié d’un nombre de points plus favorable, et il eût pu se mettre en ligne avec les plus avancés de ses partenaires !…

Au sortir du débarcadère. M. et Mrs Titbury aperçurent une voiture superbement attelée, qui attendait sans doute quelques passagers du Black-Warrior. Eux n’avaient qu’à se rendre pédestrement, en faisant porter les bagages par un commissionnaire, à Excelsior Hotel. Aussi, que l’on imagine leur surprise, — surprise à laquelle se joignit un serrement de cœur, — lorsque s’approcha un valet de pied, nègre du plus beau noir, qui leur dit :

« Mister et mistress Titbury, je pense ?…

— Eux-mêmes… », répondit M. Titbury.

Allons ! les journaux avaient dû annoncer leur départ de l’Utah, leur passage à Omaha, leur navigation à bord du Black-Warrior, leur arrivée imminente à la Nouvelle-Orléans. Eux, qui espéraient bien ne pas être si attendus que cela, ne pourraient-ils donc échapper aux inconvénients toujours coûteux de la célébrité ?…

« Et que nous voulez-vous ?… demanda M. Titbury d’un ton rébarbatif.

— Cet équipage est à votre disposition.

— Nous n’avons pas commandé d’équipage…

— On ne va pas autrement à Excelsior Hotel, répondit le nègre du plus beau noir en s’inclinant.