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le testament d’un excentrique.

travers le Nebraska, le Wyoming, les montagnes Rocheuses par la passe de Truckee, à mille toises d’altitude, puis à travers l’Utah jusqu’à l’extrémité du Nevada. Il n’était même pas descendu de wagon ni à Ogden, pour voir Great Salt Lake City, ni à Carson, pour visiter cette capitale. Il ne songea point à admirer Sacramento, la capitale de l’Eldorado californien, — une cité qui fut surhaussée presque tout entière à la suite des inondations de l’Arkansas, causes de tant de désastres. Oui ! on remblaya son sol de manière à dépasser le niveau des plus fortes crues, et les maisons furent relevées de dix à quinze mètres tout d’un bloc. Maintenant, solidement assise sur les bords de la rivière qui porte son nom, cette ville de vingt-sept mille habitants a fort bon aspect, avec son Capitole d’apparence architecturale, ses principales rues agréablement disposées, et son quartier chinois qui semble détaché des provinces du Céleste Empire.

Toutefois, si dans ces conditions un Max Réal ou un Harris T. Kymbale eussent regretté d’avoir « brûlé » Sacramento, combien ces regrets auraient été plus profonds à l’égard de San Francisco ! La métropole de l’État, qui compte trois cent mille âmes, occupe une situation unique au monde, en vue de cette baie de cent kilomètres carrés, grande comme le lac Léman, au seuil de la Porte d’Or, ouverte sur le Pacifique. Il faut parcourir ses quartiers du monde élégant, ses larges artères d’une animation intense, la rue Sacramento, la rue Montgomery, où s’élève Occidental Hotel, vaste à loger toute une colonie, cette magnifique artère, à la fois le Broadway, le Picadilly, la rue de la Paix de la merveilleuse Frisco, ses maisons éclatantes de blancheur, avec balcons et miradors à la mode mexicaine, avec leurs festons de fleurs et de feuillage, ses jardins où prospèrent les plus admirables espèces de la flore tropicale, même ses cimetières, qui sont des parcs où fréquentent les promeneurs, et, à huit milles, ce rendez-vous de Cliff-house, dans toute la beauté de sa sauvage nature. Puis, au point de vue du commerce d’exportation et d’importation, est-ce que cette métropole n’est pas l’égale des