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le pavillon vert.

— Oui… si j’avais le temps, hurla Hodge Urrican, mais je ne l’ai pas.

— Prenez-le.

— Ce que je vais prendre, c’est ce train qui part et que je ne peux manquer ! »

En effet, un train tout sifflant, tout empanaché de fumée charbonneuse, allait se mettre en marche. Pas une seconde à perdre. Aussi le commodore, s’élançant sur la passerelle entre deux wagons, s’écria-t-il d’une voix terrible :

« Monsieur le journaliste, vous recevrez de mes nouvelles… vous en recevrez…

— Quand ?…

— Ce soir même… à l’European Hotel.

— J’y serai, » répondit Harris T. Kymbale.

Mais à peine le train était-il parti, qu’il fit cette réflexion :

« Bon !… Voilà qu’il s’est trompé, l’animal !… Ce n’est pas dans le train d’Omaha qu’il est monté !… Il s’en va où il n’a que faire !… Après tout, cela le regarde ! »

Et, de fait, le train en question filait en direction de l’est, précisément celle que Harris T. Kymbale devait suivre pour gagner Charleston.

Non, Hodge Urrican ne s’était point trompé. Il retournait tout simplement à la station précédente, à Herculanum, où l’attendait Turk. À propos de sa valise restée en arrière, une vive explication s’était élevée entre le commodore et le chef de gare d’Herculanum, — discussion dans laquelle Turk menaça d’introduire ledit chef tout vivant dans le foyer d’une de ses locomotives. Son maître l’avait calmé ; puis, profitant d’un train qui démarrait, il était venu faire en personne sa réclamation en gare de Saint-Louis. L’affaire s’arrangea sans peine, la valise serait redemandée par télégramme, et c’était au moment où Hodge Urrican sortait du bureau pour retourner à Herculanum, qu’avait eu lieu sa rencontre avec le chroniqueur.

Au total, voyant son adversaire parti, Harris T. Kymbale ne