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le testament d’un excentrique

— Parce que mon journal n’en a rien dit.

— Mal renseigné, votre journal, car la nouvelle est tout au long dans le mien…

— Alors je me désabonnerai…

— Et vous n’aurez pas tort…

— Assurément, car il n’est pas permis, lorsqu’il s’agit d’un fait de cette importance, qu’un journal manque d’informations, et que ses lecteurs n’en aient pas connaissance…

— C’est impardonnable. »

Ces propos s’échangeaient entre deux citoyens de Cincinnati, qui se promenaient sur ce pont suspendu, long de cent soixante toises, jeté sur l’Ohio, presque à l’embouchure du Lacking, entre la métropole et les deux faubourgs de Newport et de Covington, bâtis sur le territoire du Kentucky.

C’est l’Ohio, la « Belle Rivière », qui sépare au sud et au sud-est l’État de ce nom du Kentucky et de la Virginie Occidentale. Des longitudes géodésiques lui sont communes à l’est avec la Pennsylvanie, au nord avec le Michigan, à l’ouest avec l’Indiana, et ce sont les eaux du lac Érié qui baignent son littoral.

En traversant ce pont, dont l’élégance égale la hardiesse, le regard voit se développer l’industrieuse cité sur neuf milles de la rive droite du fleuve, jusqu’à la cime des collines qui l’encadrent de ce côté. Puis, la vue s’étend au delà du parc de l’Eden, à l’est, et sur une banlieue de villas et de cottages perdus sous leurs verdoyantes frondaisons.

Quant à l’Ohio, on a pu justement le comparer aux fleuves d’Europe, avec ses arbres européens et ses villages à l’européenne. Alimenté, dans son cours supérieur, par l’Alleghany et la Monowghila, dans son cours moyen, par le Muskingum, le Sicoto, les deux Miami et le Licking, dans son cours inférieur, par le Kentucky, la Green River, le Wabash, le Cumberland, le Tennessee et autres tributaires, il va se confluer à Cairo au cours du Mississippi.

Tout en causant, les deux citoyens, dont la postérité pourra re-