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le testament d’un excentrique

mas R. Carlisle, ont été cités parmi les honorables groupes des personnages qui marchaient immédiatement derrière le char, il ne faudrait pas en induire qu’ils fussent les membres les plus en vue de l’Excentric Club.

De fait, à vrai dire, ce qu’il y avait seulement d’excentrique dans leur manière de vivre en ce bas monde, c’était d’appartenir au dit club de Mohawk Street. Peut-être ces considérables fils de Jonathan, enrichis dans les multiples et fructueuses affaires de terrains, de salaisons, de pétrole, de chemins de fer, de mines, d’élevage, d’abatage, avaient-ils eu l’intention « d’épater » leurs compatriotes des cinquante et un États de l’Union, le nouveau et l’ancien monde par des extravagances ultra-américaines. Mais leur existence publique ou privée, il faut en convenir, n’offrait rien qui fût de nature à les signaler à l’attention de l’univers. Ils étaient là une cinquantaine, « valant un gros chiffre d’impôt », payant une cotisation élevée, sans relations suivies avec la société chicagoise, très assidus à leurs salons de lecture et de jeu, y lisant nombre de journaux et de revues, y jouant plus ou moins gros jeu comme dans tous les cercles, et se disant parfois, à propos de ce qu’ils avaient fait dans le passé et de ce qu’ils faisaient dans le présent :

« Décidément nous ne sommes pas du tout… mais pas du tout excentriques ! »

Cependant l’un des membres semblait montrer plus que ses collègues quelques dispositions à l’originalité. Quoiqu’il ne se fût pas encore distingué par une série de bizarreries retentissantes, on croyait pouvoir compter que dans l’avenir il finirait par justifier le nom prématurément porté par le célèbre club.

Or, par malheur, William J. Hypperbone venait de mourir. Il est vrai, ce qu’il n’avait jamais fait de son vivant, on dut reconnaître qu’il venait de le faire d’une certaine façon après sa mort, puisque c’était par son expresse volonté que ses funérailles s’accomplissaient ce jour-là au milieu de l’allégresse générale.

Feu William J. Hypperbone, à l’époque où s’était brusquement terminée