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le testament d’un excentrique

qui ne tarda pas à arriver, put constater que l’état sanitaire de sa cliente ne laissait plus rien à désirer, et que toute crainte de complications graves devait être enfin écartée.

Le lendemain, 23 mai, à cinq heures du matin, la plus impatiente des deux voyageuses était sur pied.

Et ne voilà-t-il pas que cette étonnante Jovita Foley, dans une dernière crise de nerfs, se forge toute une série d’empêchements et de disgrâces, de retards et d’accidents !… Si la voiture qui allait les transporter à la gare, versait en route… si un encombrement l’empêchait de passer… s’il y avait eu un changement dans l’heure des trains… si un déraillement se produisait…

« Calme-toi donc, Jovita… calme-toi, je t’en prie… ne cessait de répéter Lissy Wag.

— Je ne peux pas… je ne peux pas, ma chérie !

— Est-ce que tu vas être dans un pareil état tout le temps du voyage ?…

— Tout le temps !

— Alors je reste…

— La voiture est en bas… Lissy… En route… en route. »

En effet, la voiture attendait, commandée une heure plus tôt qu’il ne fallait. Les deux amies descendirent, suivies des vœux de toute la maison, aux fenêtres de laquelle, même de si grand matin, se montraient quelques centaines de têtes.

Le véhicule prit par North Avenue jusqu’à la North Branch, redescendit la rive droite de la Chicago-river, la traversa sur le pont à l’extrémité de Van Buren Street, et débarqua les voyageuses devant la gare à sept heures dix.

Peut-être Jovita Foley éprouva-t-elle un certain désappointement en constatant que le départ de la cinquième partenaire n’avait point attiré un grand concours de curieux. Décidément, Lissy Wag n’était pas favorite dans le match Hypperbone. La modeste jeune fille ne s’en plaignit pas, du reste, et elle préférait de beaucoup quitter Chicago sans provoquer l’attention publique.